Pea4Ever : une vision stratégique pour l'amélioration variétale du pois
Les 24 et 25 novembre se sont tenues deux journées dédiées au projet Pea4Ever, porté par le GIE PeaBoost et soutenu par Terres Inovia. Ce fut l'occasion de présenter largement l'état des recherches, les résultats et travaux en pois protéagineux.
En début de semaine, David Gouache (avec le micro sur la photo) était aux manettes de deux journées scientifiques consacrées au projet Pea4Ever, dont l'objectif est de faire regagner de la performance au pois protéagineux. L'ancien directeur adjoint de Terres Inovia et désormais directeur du GIE Peaboost, créé avec trois sélectionneurs (Florimond-Desprez, Limagrain et RAGT), s'est lancé dans l'aventure de la génétique du pois en raison d'un constat sévère : le pois protéagineux a vu ses rendements et ses surfaces diminuer drastiquement en vingt ans.
"Nous avons pu partager les résultats concrets et définir une feuille de route stratégique pour les travaux à venir, notamment sur l'amélioration du rendement, la génomique, le pre-breeding, et la résistance aux maladies et ravageurs du pois, lors de deux journées, dont une ouverte à tous, qui a accueillie plus de 70 personnes", s'enthousiasme David Gouache.
Terres Inovia investit sur l'amont et l'aval
Trois collaborateurs de l'institut ont présentés leur travaux.
1. Bastien Remurier a parlé du bilan de campagne 2025
2. Anne Moussart a fait part des travaux réalisés sur la bactériose dans le cadre de Pea4Ever (mise au point du protocole de screening et caractérisation des populations).
La bactériose due à une bactérie, Pseudomonas syringae, est une maladie fréquente sur pois depuis 2016, pour laquelle il n’existe aucune méthode de lutte. Afin de connaitre la diversité de l’agent pathogène, préalable indispensable à une meilleure gestion des risques, Terres Inovia a constitué une collection de 119 souches entre 2017 et 2025 et identifie actuellement le pathovar auquel ces souches appartiennent. Cette étude a débuté dans le cadre du projet Phenolag (projet FranceAgriMer 2022-25, cofinancé par Sofiprotéol) et se poursuit dans le cadre du projet Pea4Ever-Amorçage (projet Casdar 2025-27, cofinancé par Sofiprotéol).
3. Teko Gouyo a fait un focus sur les travaux en cours pour la compréhension des différences de qualité d’utilisation en industrie agroalimentaire entre pois d’hiver et pois de printemps (WP5 Pea4Ever : Étude variétale et de saisonnalité sur les propriétés fonctionnelles, organoleptiques et applicatives des isolats protéiques de pois).
Le WP5 de Pea4Ever vise à comparer les pois d’hiver (PH) et les pois de printemps (PP) pour la production d’ingrédients protéiques. Alors que près de 140-150 000 t de pois sont utilisées en alimentation humaine et en ingrédients en France (campagne 2024/2025), la filière repose majoritairement sur le pois de printemps. Historiquement, la faible adoption du PH s’explique par une hétérogénéité plus marquée que les pois de printemps composition (notamment le PMG et la teneur en protéine), des rendements jugés incertains et des volumes moins réguliers pour les industriels. De nombreuses unités de fabrication d’ingrédients en France ou en Europe ont historiquement calibré leurs procédés sur le pois de printemps, mieux maîtrisé et plus standardisé. Les récents progrès génétiques en PH, rendement, protéines, PMG rendent donc nécessaire une réévaluation scientifique de ces perceptions.
Le WP5 a pour objectifs (i) de quantifier les écarts réels entre PH et PP sur leur aptitude à la transformation (les rendements industriels) et la fonctionnalité des isolats ; (ii) d’identifier les facteurs biochimiques et physiques déterminants, avec le développement d’outils de phénotypage comme la calibration NIRS ; (iii) d'évaluer le potentiel des programmes de sélection pour répondre aux besoins des transformateurs. L’enjeu final est d’accroître l’usage du pois d’hiver dans les unités de fabrication d’ingrédients.
Le dispositif expérimental, prévu sur trois ans, repose sur la production annuelle de quatre variétés contrastées (2 PH, 2 PP) dans quatre bassins de culture, suivie d’analyses de caractérisation biochimiques et physiques, de la production d’isolats et d’évaluations fonctionnelles et sensorielles des isolats. Une première série d’essais réalisée en 2025 et toujours en cours a été présenté lors de ce séminaire. Les données générées dans cette étude permettront de déterminer si les différences entre PH et PP persistent, d’établir des références technologiques pour l’industrie et d’orienter la sélection variétale.
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Un dispositif soutenu par le ministère de l'Agriculture A l'occasion des Rencontres Oléopro 2025 à Paris le 26 novembre, Annie Genevard, ministre de l’Agriculture, a confirmé dans une vidéo que les fonds publics concédés à la filière des oléoprotéagineux pour le projet Pea4Ever seront bientôt versés : "Les cinq millions d'euros identifiés sous le Casdar dans le cadre du projet Pea4Ever sont sanctuarisés, fléchés, vers la recherche variétale. Les discussions juridiques, qui ont retardé le conventionnement, touchent à leur fin, et nous pouvons désormais aboutir. La convention sera signée dans quelques jours." |
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Les enseignements techniques de 2024 pour réussir son pois d’hiver
Après une campagne climatique hors norme, marquée par une pluviométrie continue du semis à la récolte, les pois d’hiver accusent une importante pression maladie, limitant fortement les possibilités de récoltes et le potentiel final.
Si cet échec sanitaire peut décourager, il est important de recontextualiser cette pression face à un climat extrême et inattendu, non représentatif de ces dernières années. De plus, lors des dernières campagnes, ont été mis en évidence de nombreux leviers agronomiques permettant de limiter la pression maladie, et de sauvegarder le potentiel des pois d’hiver.
En 2024, ces leviers ont également montré de fortes différences dans la dynamique d’évolution de la maladie. Fort de ces enseignements, Terres Inovia propose ses leviers mais également les évolutions techniques à opérer sur ses pois d’hiver pour une meilleure maitrise du potentiel de la future campagne 2025.
Les résultats présentés dans ce dossier technique (à télécharger ici ou en bas de cette actualité) sont le fruit d’un travail collectif réalisé avec l’ensemble des partenaires. Merci à ceux qui ont permis d’alimenter ce bilan de campagne.
Dans ce dossier technique, vous retrouverez un bilan complet sur la campagne de pois protéagineux 2023/2024 :
- Un bilan climatique 2024 sans précédent
- Un complexe de maladies dominé par un champignon type Colletotrichum
- Des profils variétaux plus adaptés au risque de maladie
- Semences certifiées et graines de fermes
- L’implantation, phase de mise en place des stratégies pour limiter le risque maladie
- Déclencher des stratégies précoces plus efficaces
Pour 2025, les clés techniques pour réussir son pois d’hiver
Le contexte climatique 2024 reste très atypique et ne doit pas résumer le risque climatique et sanitaire des pois d’hiver pour les futures campagnes. Ces 10 dernières années climatiques ont même montré, en moyenne, de meilleurs rendements 7 années/10 pour le pois d’hiver à l’inverse du pois de printemps qui plafonne plus souvent avec les risques de printemps chauds et secs.
La gestion du risque de gel et de maladies précoces du pois d’hiver peut se maitriser via le cumul des divers leviers détaillés précédemment et résumés ci-dessous.
Choix d'une parcelle adaptée
Choix de la parcelle plus susceptibles d’entretenir la maladie.
Choix d’une variété résiliente
Un premier classement provisoire des variétés, souvent moins impactées par la maladie
Des différences de comportement variétal
- Tolérance au froid (en particulier pour le Nord-Est de la France) ;
- Tolérance à la chlorose ferrique (pour les sols calcaires et limons froids) ;
- Vigueur sortie hiver : les plantes se redressant rapidement en sortie d’hiver affichent moins d’exposition à la maladie en bas des tiges.
La semence certifiée à privilégier car moins susceptibles de véhiculer une maladie.
Graine de ferme : écartez les lots de semences touchées et/ou présentant un taux de germination anormalement faible. Réalisez un test de germination.
Maîtrise de l’implantation
Préparation du sol
Evitez les problèmes de lissages et compactions limitant l’infiltration de l’eau.
Date de semis
Préférez des semis de mi-novembre à mi-décembre, moins exposés au gel que les semis de début novembre.
Profondeur de semis
Assurez un semis régulier à 5-6 cm (pas moins !) pour protéger le bas des plantes du gel, du déchaussement et de la maladie.
Densité de semis
Respectez les densités de semis en connaissance du taux de germination. Les pois d’hiver ramifient plus qu’il y a 10 ans.
Association
Privilégiez les associations en bio et conduites innovantes, la seconde espèce freine physiquement la propagation de la maladie. Préférez les implantations avec rangs distincts par espèces.
Protéger tôt sa parcelle pour plus d’efficacité
En cas d’hiver favorable au complexe hivernal (douceur et humidité), intervenez à partir du 20 février (stade 4/5 feuilles du pois) avec un fongicide (voir le tableau 4 dans le dossier technique) :
SUNORG PRO 0.8 l/ha
= ou PROSARO 0.8 l/ha
= ou SUNORG PRO 0.6 l/ha + AMISTAR 0.4 l/ha
= ou PROSARO 0.6 l/ha + AMISTAR 0.4 l/ha
C’est le dernier stade permettant d’atteindre le bas des plantes où très souvent, la maladie est installée. Privilégiez un volume de bouillie de 150 l/ha à 200 l/ha (voir la figure 12 dans le dossier technique). Ne négligez pas le volume de bouillie pour permettre une bonne pénétration du traitement dans le couvert végétatif. Ensuite, le couvert se referme et les traitements fin floraison permettent seulement de protéger le dessus du couvert.
Contacts :
Bastien REMURIER – b.remurier@terresinovia.fr
Gwénola RIQUET – g.riquet@terresinovia.fr
Agathe PENANT – a.penant@terresinovia.fr
Coralie BRIER – c.brier@terresinovia.fr
Anne MOUSSART – a.moussart@terresinovia.fr
Véronique BIARNES – v.biarnes@terresinovia.fr
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Les vrai-faux sur les protéagineux
Le toastage de la graine de soja améliore ses qualités nutritionnelles
Le toastage est un chauffage intense de la graine qui permet la destruction de facteurs antitrypsiques, contenus dans la graine. Les facteurs antitrypsiques sont des protéines qui bloquent la trypsine (enzyme de la digestion des protéines) et qui viennent perturber le métabolisme des animaux monogastriques en particulier. Ils sont sensibles à la chaleur, d’où la cuisson des graines de soja. Le toastage permet de réduire également la solubilité des protéines pour les ruminants (les protéines des protéagineux étant très solubles).
Les toasters mobiles permettent d’effectuer ce traitement (chauffage par air chaud, à la flamme directe), qui doit être bien maitrisé au niveau du refroidissement afin d’obtenir une cuisson de la graine homogène.
Les facteurs anti-trypsiques du pois ne sont plus un problème grâce à la sélection variétale
Les variétés de pois protéagineux inscrites au catalogue français conviennent à l’alimentation animale, en particulier à celle des monogastriques. Ces variétés sont à fleurs blanches (sans tanins), à faible activité antitrypsique, avec un taux de protéines assez élevé (de l’ordre de 20 % de protéines brutes).
Riche en lysine et en amidon, le pois est source à la fois de protéines et d‘énergie. Les taux d’incorporation sont conditionnés à l’espèce et au stade physiologique des animaux.
Toutes les variétés de protéagineux sont adaptées aux monogastriques ?
Les variétés à fleurs blanches sont des variétés sans tannins, donc mieux adaptées aux monogastriques, les tannins étant des facteurs antinutritionnels qui ont des effets négatifs sur la croissance des animaux. Il existe encore des variétés de féverole à fleurs colorées, qui sont alors peu recommandées pour les monogastriques.
Pour l’alimentation des poules pondeuses, on choisira des variétés de féveroles sans vicine/convicine
Chez les poules pondeuses, l’utilisation de variétés riches en vicine convicine a des impacts négatifs sur les performances de ponte et la qualité des oeufs (taille plus petite). On préfèrera des variétés sans vicine/convicine, sinon on limitera le taux d’incorporation.
Le décorticage de la féverole est une opération de première transformation qui permet de réduire les tannins
Des traitements mécaniques simples comme le décorticage permettent de séparer les pellicules riches en tannins, des amandes, riches en nutriments afin d’améliorer la valeur nutritionnelle des graines. Ce traitement permet de concentrer les nutriments et d’obtenir une farine enrichie en protéines, avec moins de fibres. Ces farines de féveroles décortiquées sont utilisées en alimentation des poissons, puis vers des débouchés de la meunerie et ingrédients (farine avec fonctionnalité de blanchiment) et en oisellerie. Les pellicules éliminées lors du décorticage représentent 15 à 20 % du poids de la graine. Ce sont des matières premières riches en fibres indigestibles, pouvant être valorisées en alimentation animale dans des rations riches en fibres (ruminants, lapins, truies…).
Dans le contexte de prix actuel, le taux d’incorporation des protéagineux dans les aliments composés industriels pour le bétail, toutes filières confondues est à la hausse ?
Le taux d’incorporation des protéagineux chez les FAB est actuellement très bas, de 2 %, par manque de disponibilité de marchandises sur le marché (dans les années 90, c’était plus de 10 % des matières premières utilisées par les FAB). Ce sont moins de 300 00 tonnes de protéagineux qui sont consommés par les animaux aujourd’hui, principalement en autoconsommation.
Les valeurs nutritionnelles du pois pour les monogastriques sont améliorées par certains traitements technologiques comme le broyage ou la granulation
Le broyage des graines de pois permet d’obtenir des tailles de particules d’amidon plus fines et donc plus accessibles aux enzymes digestives. De même, la granulation de l’aliment via l’action mécanique du pressage permet d’augmenter la valeur énergétique de cette matière première.
Les maladies aériennes du pois protéagineux
Choix de la parcelle de pois d'hiver
Choisir des sols légers et profonds
- Le sol doit être bien aéré et sans obstacles au-delà de 10-15cm de profondeur pour être favorable au développement des nodosités et à l’enracinement.
- Limiter le risque de stress hydrique en évitant les sols séchants (sols très superficiels ou caillouteux non irrigués). Le pois est assez sensible à la sécheresse en raison de son enracinement peu profond (inférieur à 80 cm) et relativement peu ramifié.
- Privilégier des sols assez profonds, si possible avec 150 mm de réserve utile, car le pois de printemps doit être bien alimenté en eau jusqu’à mi-juin, voire fin juin. Le pois d’hiver supporte d’être implanté dans es sols plus superficiels avec 70-80 mm de réserve utile.
- Les sols argileux lourds et les limons battants hydromorphes sont peu adaptés à la culture du pois, car ils sont plus sensibles au tassement, qui limite la mise en place des racines. En cas de pluie abondante en hiver, ces sols se gorgent d’eau et la plante s’asphyxie.
Pois au stade 5 feuilles
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