Le mildiou nécessite une gestion sur le long terme basée sur les leviers agronomiques et la pérennité des résistantes variétales et des matières actives disponibles et à venir. Petit tour de piste des connaissances essentielles sur cette maladie.
Si je ne cultive pas de tournesol pendant plusieurs années sur la même parcelle, le risque mildiou est nul Voir la réponse
FAUX
Le mildiou est présent dans le sol de toutes les parcelles où le tournesol a été cultivé à un moment ou à un autre. L’absence de sa plante-hôte préférée sur une parcelle réduit effectivement le risque car le mildiou a absolument besoin du tournesol pour faire son cycle et ne peut donc pas se multiplier en son absence. Le réservoir d’inoculum dans le sol s’épuise peu à peu. Néanmoins, sa forme de conservation (oospores) très résistante lui permet de survivre 10 ans dans une parcelle même en l’absence de tournesol.
De plus, le mildiou peut s’installer sur d’autres plantes qui appartiennent à la même famille que le tournesol :
Des adventices : l’ambroisie à feuilles d’armoise, le bidens, le xanthium, les bleuet
Le niger et le tournesol de graines de ferme utilisés en interculture
Les repousses de tournesol sont aussi un bon relais pour le mildiou car celles-ci ne bénéficient plus de la résistance de la variété d’origine. La présence de ces plantes sur une parcelle après un tournesol même ancien contribue au maintien de l’inoculum, donc au maintien du risque...
Repousse de tournesol dans une parcelle de céréales observée en septembre 2015 en Haute-Garonne. Les sporulations présentes sous les feuilles indiquent que le mildiou a pu faire son cycle ; le réservoir d’inoculum de la parcelle est renforcé (photo Terres Inovia).
Enfin, même si le mildiou est une maladie plutôt inféodée à la parcelle car il attaque le tournesol par le système racinaire (on parle d’un agent pathogène tellurique), il peut néanmoins investir les parcelles avoisinantes : ses oospores, peuvent « voyager » du haut vers le bas d’un côteau à la faveur du ruissellement de l’eau ; on ne peut pas non plus exclure le transport des oospores d’une parcelle à l’autre par les engins agricoles.
Le risque zéro n’existe hélas pas, mais on dispose néanmoins d’un arsenal de bonnes pratiques et de solutions génétiques et chimiques pour réduire les risques !
La variété est le seul moyen de lutter contre le mildiou Voir la réponse
FAUX
La lutte génétique est effectivement l’un des piliers de la lutte contre le mildiou. Au fil de l’apparition de nouvelles races sur le territoire, les sélectionneurs ont pu proposer des variétés résistantes aux producteurs grâce à la découverte et l’exploitation de nouveaux gènes de résistance très efficaces. Rappelons cependant que si le mildiou n’a jamais occasionné de diminution significative du rendement moyen national, c’est grâce à l’association de la lutte génétique avec de bonnes pratiques agronomiques, elles aussi très efficaces, et une protection fongicide (traitement de semences) raisonnée. Faire reposer la lutte contre le mildiou seulement sur la génétique est une erreur : le mildiou est en effet capable de contourner une résistance génétique en 5 ans, ce qui génère l’apparition de nouvelles races.
Le mildiou est particulièrement innovant ! Dans une parcelle, il peut être comparé à une population d’individus, qui ne sont pas tous exactement pareils : parmi eux, certains, en proportion très très faible, ont une petite différence dans leur ADN, qui fait qu’une variété jusqu’alors résistante, ne les reconnaît plus et est attaquée. Autre phénomène : on ne le soupçonne pas, mais le mildiou a aussi une vie sexuelle ! En se croisant, deux individus de races différentes jusqu’ici contrôlées par la résistance des variétés peuvent ainsi produire une descendance dotée d’une nouvelle virulence. La race 714 est ainsi probablement issue de « l’union » entre des individus de la race 304 et de la race 710. Tous ces nouveaux individus deviennent peu à peu majoritaires dans la population de mildiou de la parcelle, et causer des attaques significatives sur des variétés attendues comme résistantes…
Les attaques les plus fréquentes du mildiou (qui sont hélas les plus nuisibles !) sont issues de l’infection de la radicule des plantules de tournesol au moment de la levée. Le mildiou colonise ensuite peu à peu tous les tissus des plantules, engendrant des pieds nanifiés et stériles. Or, le mildiou aime l’eau ! Ses petites spores infectieuses sont justement munies de 2 petits flagelles, pour mieux se déplacer vers les radicules de tournesol. Elles ne peuvent toutefois réussir cette « migration » vers leur cible que si de l’eau circule dans le sol : on parle d’eau libre.
Or, le mildiou aime l’eau ! Ses petites spores infectieuses sont justement munies de 2 petits flagelles, pour mieux se déplacer vers les radicules de tournesol. Elles ne peuvent toutefois réussir cette « migration » vers leur cible que si de l’eau circule dans le sol : on parle d’eau libre.
Sous microscope, voici une spore de mildiou à 2 flagelles arrivée sur une radicule de tournesol grâce à l’eau libre présente dans le sol ; la petite barre blanche en bas de la photo donne l’échelle : 5 microns, c’est à peu près le diamètre d’un brin de soie d’araignée ! (Photo Inrae-CNRS Toulouse) 7ème page de la publication Gascuel et al, 2014
Un cumul de 50 mm de pluie sur les 10 jours qui encadrent le semis suffit en général pour générer de l’eau libre dans le sol. Les printemps pluvieux sont ainsi ceux où le risque mildiou est le plus élevé.
Décaler la date de semis pour éviter un épisode pluvieux est un levier très efficace pour empêcher les attaques, même sur une variété qui ne résiste pas à toutes les races de mildiou présentes localement. Mais cela n’est pas toujours facile, surtout lors de printemps pluvieux... Néanmoins, mieux vaut semer plus tard, même au risque d’entamer un peu le potentiel de rendement de la parcelle, qu’avoir une attaque de mildiou carabinée qui, au-delà de pénaliser la production, va compliquer la gestion de la maladie pour plusieurs années : le réservoir d’inoculum reconstitué au taquet est viable très longtemps…
Le mildiou est-il vraiment capable de résister au traitement de semences ? Voir la réponse
VRAI
L’Apron XL, traitement de semences largement utilisé depuis 30 ans pour protéger le tournesol, a pour substance active le métalaxyl-M. Très efficace, il a permis de sauver la culture du tournesol au début des années 1990, juste après l’apparition des races 703 et 710 alors que les variétés ne disposaient pas encore de résistance génétique face à ces nouvelles races. Le mode d’action de cette molécule est dit unisite : elle agit à un seul endroit de la cellule de l’agent pathogène. Cinq ans après son utilisation rendue obligatoire sur toutes les variétés en 1990, apparaissaient les premiers isolats de mildiou résistants. Toujours largement utilisé alors qu’il n’était plus obligatoire sur aucune variété depuis 2005 (85% à 90% de la sole tournesol sont traités Apron XL chaque année), le métalaxyl-M est beaucoup moins protecteur puisque de nombreux isolats avec des niveaux élevés de résistance (>50%) sont détectés chaque année, notamment sur les races 704 et 714 les plus présentes sur le territoire et tout récemment sur les isolats de mildiou contournant les variétés dites RM9.
Mais des solutions existent !
Cette utilisation répétée sur une même parcelle d’une même substance active à mode d’action unisite (qui conduit à une résistance au traitement de semences) s’apparente à l’utilisation répétée de variétés avec le même gène de résistance spécifique (qui conduit à l’apparition de nouvelles races contournant la résistance variétale). De nouveaux traitements de semences, à mode d’action différent de celui du métalaxyl-M, arrivent sur le marché. Protéger leur efficacité passe par leur utilisation raisonnée (ne pas répéter l’utilisation tous azimuts du métalaxyl-M !) : ne pas utiliser un traitement de semences avec une seule substance active et varier les associations avec différents modes d’action.
Variété résistante à tout et traitement de semences, c’est « l’assurance tous risques » non ? Voir la réponse
FAUX
On dispose effectivement de plusieurs moyens de lutte contre le mildiou, mais il s’agit de bien les utiliser pour les faire durer !
N’oublions jamais deux choses :
le traitement de semences peut être lessivé en cas de grosses pluies
et le mildiou a une capacité d’adaptation extraordinaire face aux molécules fongicides et aux gènes de résistance des variétés !
Dans cette situation, où l’on cherche la protection maximale, le risque est d’utiliser trop régulièrement sur la parcelle les mêmes solutions génétiques et chimiques ; or ce choix peut vite s’avérer vite contre-productif compte-tenu du potentiel d’adaptation du mildiou. Ce serait comme un automobiliste qui mettrait bien sa ceinture de sécurité dans sa voiture classée 5 étoiles au crash-test : en roulant à 150 km/h sur une route mouillée, il a peu de chances d’échapper à l’accident !
La solution pour une protection durable du tournesol contre le mildiou ? Elle repose sur 3 conseils-clés :
ne pas oublier la grande efficacité des bonnes pratiques agronomiques,
varier les profils RM des variétés,
utiliser raisonnablement les traitement de semences.
J’ai eu une forte attaque de mildiou sur une variété RM9 : pourquoi ?
Une variété dite RM9 résiste aux 9 races de mildiou suivantes : 100, 304, 307, 314, 334, 703, 704, 710 et 714. Pour résister au mildiou, une variété comporte un ou plusieurs gènes de résistance spécifique (gènes Pl).
Si les variétés cultivées sur une parcelle au fil des campagnes comportent le même gène de résistance, ce gène exerce une pression de sélection sur le mildiou présent dans la parcelle : sous cette pression, le mildiou n’a d’autre choix que de s’adapter pour survivre, et il le fait ! Vous connaissez le phénomène de résistance des graminées quand on utilise trop souvent des herbicides avec le même mode d’action ? Les graminées devenues insensibles à l’herbicide se multiplient, deviennent majoritaires et rendent le traitement complètement inefficace. Ici, c’est la même chose : La résistance de la variété devient inefficace, on dit qu’elle est contournée par la nouvelle race de mildiou qui a émergé.
Avec trois printemps pluvieux favorables aux attaques, ce contournement de résistance, détecté depuis 2018 sur plusieurs variétés RM9, s’est exprimé à nouveau en 2019 puis confirmé en 2020. Au-delà du choix variétal, le délai de retour du tournesol dans la rotation joue un rôle majeur dans ce contournement : les attaques sur les variétés RM9 qui nous ont été signalées concernent principalement des parcelles en rotation courte où le tournesol revient tous les 2 ans… or, ce délai de retour est beaucoup trop court pour permettre l’épuisement du stock d’inoculum dans la parcelle. Une grande quantité de mildiou est donc exposée tous les deux ans à la même résistance, ce qui favorise l’émergence d’une population capable d’infecter des variétés jusqu’ici résistantes.
Parmi les variétés RM9, certaines ne comportent qu’un gène qui confère à lui tout seul la résistance aux 9 races, d’autres cumulent plusieurs gènes. La connaissance de ces gènes est propre à chaque semencier et n’est pas accessible à Terres Inovia. Elle est cependant cruciale pour raisonner le choix variétal. Les parcelles concernées par de fortes attaques sur des variétés RM9 ont probablement été cultivées plusieurs campagnes de suite avec des variétés peut-être de semenciers différents mais portant le ou les mêmes gènes de résistance, hélas sans le savoir…
Je n’ai pas vu de mildiou sur mes derniers tournesols et pourtant, ma parcelle a subi une grosse attaque cette année : pourquoi ?
Cette attaque indique qu’il y avait forcément de l’inoculum de mildiou dans la parcelle. Cet inoculum est probablement issu d’une attaque plus ancienne (le mildiou est présent partout où le tournesol est cultivé) mais aussi de petites attaques qui sont passées inaperçues ces dernières années : quelques plantes nanifiées par-ci par-là suffisent à reconstituer le réservoir d’inoculum pour les campagnes suivantes. De même, les petits foyers dans les tournières paraissent inoffensifs : pourtant ces petites attaques, même si elles n’entament pas le potentiel de rendement de la parcelle, contribuent, elles aussi, à enrichir le sol en oospores, qui restent viables 10 ans et sont à l’origine des infections.
Une attaque de mildiou peut facilement passer inaperçue dans une parcelle de tournesol (photo Terres Inovia).
Cet inoculum peut aussi avoir été maintenu par :
des repousses de tournesol, qui n’ont plus de résistance génétique efficace,
des adventices capables d’héberger le mildiou apparues au fil de la rotation : l’ambroisie à feuille d’armoise, le bidens, les centaurées, le xanthium,
le cas échéant le niger cultivé en interculture, lui aussi sensible au mildiou,
Et aussi le tournesol utilisé dans les couverts souvent issus de graines de ferme.
Cette attaque indique également que les conditions de réussite de l’infection ont été réunies : en plus de l’inoculum dans le sol en quantité suffisante, la levée du tournesol a dû se produire au cours d’un épisode pluvieux suffisamment important pour que l’eau circule dans le sol (on parle d’eau libre) et amène les spores infectieuses du mildiou auprès de la radicule des tournesols. En effet, un cumul de 50 mm de pluie sur les 10 jours encadrant le semis suffit en général pour avoir de l’eau libre dans le sol. Une préparation du sol qui n’a pu se réaliser qu’en conditions difficiles peut également favoriser l’accumulation d’eau dans les zones tassées, même avec un cumul de pluies moindre.
Cette année, les semis de début mai dans le Gers ont subi de gros abats d’eau au moment de la levée, favorables aux infections. Le risque a également pu être élevé pour les semis de fin avril, notamment dans les parcelles où la préparation du sol a été difficile.
Côté semences, cette pluviométrie importante a également pu lessiver le traitement de semences efficace contre le mildiou (Apron XL), limitant cette protection. De plus, n’oublions pas que toutes les races présentent un niveau de résistance plus ou moins élevé à ce traitement de semences.
Enfin, le profil RM de la variété implantée a pu s’avérer inadapté face à la race de mildiou majoritaire sur la parcelle.
Deux parcelles semées à la même date avec la même variété, l’une touchée et l’autre pas : pourquoi ?
Une attaque de mildiou dépend de nombreux facteurs : certains sont liés à la campagne en cours, comme la date de semis qui aura un impact déterminant sur les conditions de levée, et le choix variétal bien sûr ; d’autres sont liés au passé de la parcelle.
Si deux parcelles situées côte à côte et semées avec la même variété sont si différentes, deux options sont à explorer :
Elles ont des historiques proches, mais c’est leur date de semis qui fait la différence : l’une a levé en conditions bien ressuyées, sans eau libre dans le sol, ce qui a empêché les infections, alors que la levée de la seconde s’est faite dans des conditions très pluvieuses et donc très favorables aux infections ;
Semées à la même date, leurs historiques différents font la différence : le tournesol est-il revenu plus souvent dans la rotation sur l’une que sur l’autre ? avec quelles variétés ? se peut-il que le mildiou ait contourné la résistance de la variété utilisée sur l’une mais pas l’autre ?
Sept points-clés à explorer pour expliquer les attaques de mildiou.
Choisir sa variété de tournesol est une démarche complexe qui doit être faite avec soin. Le choix variétal conditionne en grande partie la réussite de la culture et donc son bilan économique.
Une variété exprimera d’autant mieux son potentiel de rendement que ses caractéristiques agronomiques seront adaptées à la situation de la parcelle, au contexte sanitaire en particulier. Le choix de la variété influe également sur l’itinéraire technique et les cultures à venir dans la rotation.
En trois étapes, voici les critères clés à prendre en compte pour optimiser son choix variétal : profil d’acide gras, tolérance aux herbicides, précocité et profil sanitaire.
1 - Oléique ou Linoléique ?
La contractualisation proposée par un organisme économique et le débouché envisagé orienteront le choix d’une variété oléique ou linoléique. Le ratio linoléique/oléique est différent en fonction des territoires. Cependant la conduite culturale entre les deux types variétaux reste similaire.
2 - VTH[1] ou non VTH ?
La maîtrise de certaines mauvaises herbes difficiles peut motiver l’utilisation d’une variété VTH, mais il convient toutefois de raisonner l’usage de ces variétés dans une optique de durabilité. En effet les herbicides associés aux variétés VTH, PULSAR 40 / LISTEGO et EXPRESS SX, sont des inhibiteurs de l’ALS, au même titre que les sulfonylurées et les triazolopyrimidines (PRIMUS, ABAK, etc.) employées sur céréales. L’usage répété d’un même mode d’action exerçant une pression de sélection, le développement d’adventices résistantes n’est pas à exclure. L’utilisation de ce mode d’action doit donc être raisonné dans la rotation.
[1] VTH : Variété Tolérante aux Herbicides
En pratique
Choisir une variété tolérante aux herbicides, Clearfield® ou Express Sun®, uniquement sur les parcelles dominées par une flore difficile (xanthium, tournesols sauvages, ambroisies, datura, chardon, liseron des haies). Lorsque la flore adventice est « classique », les programmes de prélevée suffisent, il est alors inutile de choisir une variété VTH.
En complément : Zone à risque tournesol sauvage, soja après un tournesol Clearfield : vigilance !
Dans un contexte dominé par la présence de tournesols sauvages (en particulier Sud-Ouest et Poitou-Charentes), la réalisation du désherbage de postlevée devient indispensable avec l’usage d’une variété VTH. Cette intervention doit se faire dans les conditions d’application optimale :
aucune zone non désherbée et compléter si nécessaire par un binage (entre les stades 4 et 12/14 feuilles du tournesol)
Dans le cas contraire, cela peut conduire à des croisements entre l’hybride cultivé et les tournesols sauvages et donner lieu très rapidement à l’apparition de tournesols sauvages résistants qu’il sera alors impossible de détruire. Des cas avérés ont été identifiés dans le Sud-Ouest et en Poitou-Charentes.
Soja après un tournesol Clearfield : anticiper le programme désherbage avec des solutions autres que le Pulsar 40 pour éliminer les repousses de tournesol (bentazone).
3 – Comportement maladies et précocité : quelles sont les contraintes selon la situation ?
Ce sont les contraintes pédoclimatiques, la pression maladie régionale et/ou locale mais aussi le risque Orobanche cumana, qui vont dans un troisième temps, dicter les priorités pour le tri des variétés. On départagera en dernier lieu les variétés candidates en optant pour celles ayant eu les meilleures performances régionalement.
Rappelons que l’allongement de la rotation est un des leviers efficaces pour réduire la prolifération de certaines maladies.
Précocité : une adaptation de la variété au pédoclimat
Le choix d’une variété précoce est primordial pour récolter le tournesol avant le retour des pluies de fin d’été/automne, en particulier dans les zones plus humides et fraîches comme les régions du Nord, la bordure pyrénéenne ou la façade atlantique.
En pratique
Adapter la précocité de la variété à la région, au type de sol et à la date de semis. Une précocité adaptée permet de limiter le stress hydrique post floraison et le développement des maladies de fin de cycle (sclérotinia du capitule et botrytis), pour assurer de bonnes conditions de récolte.
Orobanche cumana : une vigilance dans les secteurs à risque
Cette plante parasite produit des milliers de graines par hampe, leur taille minuscule rend leur diffusion particulièrement aisée au sein de la parcelle mais également aux champs environnants. De ce fait, et vu sa capacité de dissémination, la gestion de l’orobanche doit se raisonner à l’échelle d’un secteur. Il faut ajouter que la nuisibilité de ce parasite est très forte puisqu’en fonction de son agressivité et de sa période d’émergence, elle peut aller jusqu’à détruire la plante de tournesol.
En pratique
La tolérance variétale est le premier des moyens de lutte disponibles à utiliser. Dans les secteurs à risque il est en effet essentiel d’implanter uniquement des variétés ayant un bon comportement vis-à-vis de l’orobanche. La classification Terres Inovia permet de discriminer les variétés.
Mildiou : un choix à la parcelle
Cette maladie, inféodée à la parcelle, se conserve jusqu’à 10 ans dans le sol. Même si une grande partie de l’inoculum ne se maintient qu’au cours des 3 à 4 premières années après une attaque, il est recommandé d’allonger la rotation pour limiter les risques : viser donc un retour du tournesol au plus tous les 3 ans sur une même parcelle. En parallèle le comportement variétal est primordial, et sans un choix variétal optimal, les pertes peuvent atteindre 1.5 à 2.5 q/ha par tranche de 10% de plantes atteintes.
Choisir le profil mildiou de la variété en fonction de sa parcelle
Un mot d’ordre : alterner les gènes de résistance ! Selon leur résistance génétique, les variétés permettent de contrôler tout ou partie des races de mildiou présentes sur notre territoire. Le principe d’une lutte durable contre le mildiou repose sur une utilisation raisonnée de ces résistances, pour maintenir leur efficacité dans le temps et limiter le risque d’apparition de nouvelles races. L'utilisation systématique et exclusive de variétés résistantes à toutes les races serait le meilleur moyen de créer de nouvelles races virulentes, contre lesquelles les sélectionneurs ne pourraient plus rien faire !
En 2019, la présence de mildiou est restée significative et les races 704 et 714 sont aujourd’hui largement répandues sur le territoire (voir carte). Dans la plupart des cas, ces races sont résistantes au traitement de semences à base de méfénoxam (Apron XL). Plusieurs cas d’attaque de mildiou sur des variétés RM9 dans des rotations courtes ont été observés cette année. Ils suggèrent une évolution de la virulence de la race 714virulence de la race 714, ce qui milite encore plus pour un raisonnement du choix variétal !
Les départements touchés par les races 704 et 714 depuis leur apparition (situation en 2019) :
En pratique
Diversifier son choix variétal en alternant les profils de résistance d’une campagne à l’autre sur les différentes parcelles de votre exploitation.
Le traitement des semences n’est pas obligatoire. Pour les semis 2020, les semences peuvent être traitées à l’Apron XL en fonction du profil de résistance des variétés. Ce traitement n’apporte toutefois pas de garantie absolue : en cas de fortes pluies, il peut être lessivé et il existe au sein de toutes les races connues sur le territoire, des populations qui y sont partiellement résistantes.
Attention : quel que soit le type de variété choisi, une attaque de mildiou ne peut être exclue, compte-tenu de l’apparition potentielle de nouvelles races.
Enfin, ne pas oublier l’efficacité remarquable des quelques mesures agronomiques très simples !
Toutes ces recommandations sont aussi de mise pour le tournesol en dérobé ou en couvert.
En complément : Identifier le profil de résistance des variétés
Les variétés type RM8 (résistantes aux 9 races sauf à la 334) et RM9 (résistantes aux 9 races officiellement reconnues) permettent de gérer les races de mildiou présentes en France, dont la race 714. De nombreuses races existent en Europe, il faut être vigilant que la dénomination RM8/RM9 concerne bien les races reconnues officiellement en France (100, 304, 307, 314, 334, 703, 704, 710, 714.).
Où trouver l’information sur la résistance des variétés ?
Le profil de résistance des variétés inscrites au catalogue français face aux 9 races officiellement reconnues est disponible sur le site du GEVES et repris sur la fiche de description des variétés surMyVar.
Attention, les profils de résistance de toutes les variétés inscrites en France ne sont pas toujours complets, leur détermination se faisant à la demande des semenciers : l'institut invite donc éventuellement les distributeurs et les agriculteurs à compléter ces informations auprès de leurs fournisseurs de semences.
Verticillium : une lutte essentiellement variétale
Il n’existe à ce jour aucun produit fongicide pour lutter contre le verticillium, qui peut provoquer des pertes de rendement de 20 à 50% selon la gravité des attaques. De même, les effets des pratiques culturales (date de semis, fertilisation, …) sont peu connus. Quant à l’allongement de la rotation, il ne permet de réduire le risque qu’appliqué préventivement ; la durée de survie des microsclérotes (forme de conservation du champignon dans le sol) étant de 14 ans, une fois la maladie installée dans une parcelle, c’est trop tard !
La tolérance variétale reste donc le principal moyen de lutte contre cette maladie.
En pratique
Dans les zones de production touchées par la maladie (voir carte), opter pour des variétés très peu sensibles, voire peu sensibles, dans toutes les parcelles où la maladie s’est exprimée, même longtemps avant.
Dans les zones de production où la maladie n’a pas été détectée, choisir des variétés sans craindre leur comportement face au verticillium. Mais le risque zéro n’existant pas, ne pas hésiter à régulièrement observer les parcelles.
Phomopsis : optimiser l’usage d’un fongicide en fonction de la génétique
Tige touchée par phomopsis
Le phomopsis, présent sur l’ensemble du territoire, peut engendrer des pertes importantes selon la précocité de l’attaque : 1 à 3 q/ha et 1 point d'huile pour 10 % de plantes avec tache encerclante sur tige.
En pratique
Quelle que soit votre région, éviter les variétés sensibles, elles font prendre trop de risques et peuvent être à l’origine de nouveaux foyers de contamination pour les secteurs alentours.
Les variétés résistantes peuvent être cultivées dans toutes les régions, sans traitement fongicide. Quant aux variétés peu sensibles et très peu sensibles, elles sont également utilisables dans toutes les régions, et pourront nécessiter un traitement fongicide en végétation, selon le risque régional de l’année et la situation de votre parcelle (sol profond, disponibilité en azote, densité…).
Sclérotinia capitule : combiner génétique et pratiques agronomiques
Le sclérotinia peut attaquer de nombreuses cultures et même s’il peut toucher toutes les zones de production du tournesol, il reste plus préjudiciable dans les zones humides en fin de cycle.
Ce champignon est à l’origine de symptômes sur tous les organes de la plante : collet, bouton, feuille/tige et capitule. Le choix variétal et des mesures agronomiques adaptées à chaque type d’attaque sont les deux moyens à associer pour mieux lutter contre cette maladie.
En pratique
Le tournesol ne dispose que de tolérances face à cette maladie et chaque organe a son propre niveau de résistance : ainsi, une même variété peut être sensible aux attaques au collet et peu sensible aux attaques sur capitule. Les attaques sur capitule sont souvent les plus dommageables et les pertes de rendement peuvent atteindre 50 %. De ce fait, Terres Inovia évalue les variétés vis-à-vis du sclerotinia capitule, ce qui donne lieu à une classification.
Pour aller plus loin
Quel est le contexte sanitaire de mon secteur ?
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Les plantes nanifiées par le mildiou peuvent arriver à floraison et développer un capitule ; celui-ci reste horizontal, dressé vers le ciel à floraison, et plus ou moins stérile.
Sclerotinia
Les attaques de sclérotinia sur capitule ont lieu pendant la floraison, favorisées par des périodes pluvieuses. La contamination a lieu dès que les premiers cercles de fleurons s'épanouissent. Le champignon envahit peu à peu le tissu spongieux, provoquant l’apparition de taches de pourriture molle beige clair au dos du capitule. Le champignon colonise ensuite tout le capitule et un abondant mycélium blanc apparaît sur sa face fleurie. Ce mycélium sera à l’origine de la formation d’une grille de sclérotes entourant les graines. Le capitule est alors complètement détruit. Les graines et les sclérotes tombant au sol, seul subsiste un « balai de sorcière ». Cette évolution est très dépendante de la pluviométrie de fin de cycle.
Le botrytis est un champignon qui ressemble beaucoup au sclérotinia. Il provoque lui aussi une pourriture, un peu plus foncée que celle du sclérotinia. En conditions humides, celle-ci se recouvre d’un feutrage gris foncé dense et plat. Selon la précocité de l’attaque, le botrytis peut envahir l’ensemble du capitule, face fleurie comprise. Il détruit tous les tissus, contrairement au sclérotinia qui laisse les fibres libéro-ligneuses en l’état. Ses sclérotes sont fins et allongés, ceux du sclérotinia beaucoup plus dodus.
Rhizopus
Les attaques de Rhizopus sont rares ; elles sont à l’origine d’une pourriture molle et humide au dos du capitule, tirant sur le « rougeâtre ». En parallèle à la destruction des tissus, le champignon fructifie sous forme d’un duvet assez aérien (d’où le nom de pourriture chevelue) qui devient gris à l’intérieur des tissus du capitule voire sur la face fleurie. Cette sporulation observable avec une petite loupe ressemble à des têtes d’épingle (petites boules noires au sommet de filaments blancs). Les symptômes s’observent en général pendant la phase de remplissage.
Phomopsis
La contamination des capitules par le phomopsis s’effectue depuis une bractée ou l'une des petites feuilles du dos du capitule. Une tache beige-brun rougeâtre, sèche, progresse en pointe vers la crosse du capitule, affectant une portion du dos du capitule.
Phoma
Le phoma sur capitule se manifeste le plus souvent par une tache noire arrondie, sèche, entourant de la crosse du capitule. Ces attaques peuvent être à l'origine d'une dissémination du champignon par les semences, le champignon étant capable de s'installer dans la coque et dans l'amande.
Phomopsis et phoma n’occasionnent pas de pourriture sur capitule, contrairement au sclérotinia, botrytis et rhizopus.
Le mildiou provoque des symptômes d’autant plus graves que l’attaque est précoce. Petit tour de piste des symptômes en tout début de campagne…
Si le mildiou peut engendrer une fonte de semis, les symptômes les plus courants en début de cycle se révèlent dès le stade plantule.
Le mildiou aime l’eau !
Ces symptômes sont le fruit de contaminations dites primaires : le mildiou s’installe dans la radicule qui émerge de la semence, grâce à la présence d’eau libre. Cette eau, qui s’écoule librement dans la porosité du sol, permet aux spores mobiles de l’agent pathogène d’atteindre les radicules des plantules. Les risques sont donc particulièrement élevés lors qu’un épisode pluvieux important (50 mm) se déclenche dans les 10 jours encadrant le semis. Pas d’eau libre, pas de mildiou !
Dans ce cas, une visite en début de campagne permet de faire le point sur l’état de santé « mildiou » de la parcelle. Cette visite précoce présente le grand avantage de ne pas passer à côté des symptômes de mildiou, qui peuvent être plus difficiles à repérer lorsque le couvert se développe et les plantes grandissent. Souvent, un petit foyer de mildiou se déclare à l’entrée de parcelle, là où le passage du matériel agricole a créé des zones de tassement favorables à l’accumulation d’eau libre. N’hésitez pas à rentrer plus avant dans la parcelle afin de compléter votre diagnostic !
Des symptômes faciles à reconnaître
En début de cycle, les plantules contaminées présentent un retard de croissance, elles apparaissent « rabougries », montrent des cotylédons jaunes. Des zones décolorées vert plus clair sont visibles sur les feuilles, dont la face inférieure est recouverte d’un feutrage blanc plus ou moins intense : ce feutrage correspond aux sporulations du mildiou, à partir desquelles pourront se déclarer des contaminations secondaires mais surtout « se fabriquer » l’inoculum pour les campagnes suivantes. Le mildiou va peu à peu coloniser tous les tissus de la plante et « monter dans les étages » : on dit qu’il est systémique et son développement à l’intérieur de la plante entraîne un nanisme caractéristique : les entre-nœuds sont raccourcis.
Nanisme, décoloration et feutrage blanc sont les révélateurs d’une attaque primaire de mildiou sur tournesol.
La nuisibilité de ces attaques primaires est globalement estimée à 1% de perte de rendement pour 1% de plantes nanifiées. Elle est donc significative en cas d’attaque généralisée ou par grands foyers mais quasi-nulle lorsque quelques pieds isolés sont touchés, ou qu’un petit foyer est présent à l’entrée de la parcelle.
Dans tous les cas, la présence de symptômes signifie que le mildiou est là, bien présent dans la parcelle, et que le stock d’inoculum va grossir pour les prochaines campagnes. Allongement de la rotation, semis hors période pluvieuse annoncée et choix variétal adapté sont vos alliés pour la prochaine campagne !
Ne pas confondre mildiou et rouille blanche (anciennement albugo) !
Des attaques précoces de rouille blanche peuvent parfois se manifester : celles-ci n’occasionnent pas de nanisme. Des cloques de couleur vert clair se développent sur les feuilles. Sur leur face inférieure, les sporulations du champignon forment des croûtes et non un feutrage homogène.
Absence de nanisme, cloques et croûtes : les bons indices pour distinguer la rouille blanche du mildiou.