Le projet Concerto à l’honneur aux Rencontres des insectes pollinisateurs
Les 4èmes Rencontres nationales des insectes pollinisateurs, organisées par l’association Arthropologia, se sont déroulées à Lyon les 23 et 24 octobre. Terres Inovia y était invité pour présenter la stratégie agroécologique expérimentée dans le cadre du projet Concerto, visant à atténuer les dégâts de ravageurs avec moins d’insecticides.
Les populations d’insectes pollinisateurs sont actuellement en déclin significatif. C’était justement l’enjeu de cet événement organisé à Lyon au cours duquel agriculteurs, techniciens, acteurs de la recherche, administrations publiques, collectivités locales et associations naturalistes se sont réunis pour partager connaissances, outils pratiques et expériences de terrain afin de favoriser le développement de ces espèces.
Le projet Concerto reconnu comme une initiative inspirante

Concerto a fait l'objet d'une table-ronde lors des 4èmes Rencontres nationales des insectes pollinisateurs (crédit photo : M.Geloen-Terres Inovia)
Lors de ces Rencontres, Concerto, piloté par Terres Inovia, a été mis à l’honneur.
Ce projet territorial fait suite au projet R2D2 qui a démarré il y a sept ans sur les plateaux de Bourgogne. « Il a été reconnu par les participants comme une initiative inspirante en ligne avec les stratégies de protection des pollinisateurs », se félicite Nicolas Cerrutti. C’est pourquoi le chargé d’études de Terres Inovia, spécialisé dans la pollinisation et les régulations naturelles, a présenté, avec Michael Geloen, ingénieur de développement, Concerto lors d’une table-ronde et d’un atelier dédié.
Ce projet territorial vise à accompagner un collectif d’agriculteurs pour limiter les dégâts d’insectes tout en réduisant l’utilisation d’insecticides. Il combine, dans une stratégie originale d’action collective territoriale, de l’échelle de la parcelle à celle du paysage, différents leviers pour renforcer la robustesse des cultures avec la démarche de colza robuste, manipuler le comportement des ravageurs par les techniques d’intercultures pièges et développer les régulations biologiques. « Cette approche, qui permet aux neuf agriculteurs du projet de maintenir les performances économiques des systèmes tout en réduisant l’IFT insecticide de 30 % sur le colza, a été saluée comme une initiative inspirante, en ligne avec les objectifs de protection des insectes pollinisateurs ».
Des freins au changement à lever
Dans ce projet, l’accompagnement des agriculteurs au changement est un défi à relever car de nombreux freins – sociotechniques ou liés à la situation individuelle des exploitants- existent encore. « Les succès et les difficultés rencontrés depuis le démarrage du projet R2D2 ont été partagés avec la cinquantaine de personnes présentes lors de l’atelier », précise Nicolas Cerrutti. De riches échanges qui ont permis de partager des retours d’expériences issus du terrain et de renforcer le dialogue entre la filière agricole et les différents acteurs engagés dans la protection des pollinisateurs.
Concerto : un projet centré autour d’un collectif d’agriculteurs
Les solutions et les leviers mis en œuvre sont co-construits avec le groupe et consistent à : • Améliorer les régulations biologiques grâce à la mise en place d’un réseau d’infrastructures agroécologiques interconnectées. |
Plus d'informations sur Concerto
Protéi’Sol : « Cap Agronomie® apporte une très belle plus-value au projet »
Terres Inovia est partenaire du projet Protéi’Sol, piloté par Earthworm Foundation, pour encourager à des pratiques agricoles régénératrices et durables. L’institut technique y anime des formations sur le terrain auprès de techniciens et d’agriculteurs des Hauts-de-France dans le cadre du programme Cap Agronomie®. Focus sur ce partenariat avec Marie-Pierre Albouy-Duclercq, responsable des partenariats d’Earthworm Foundation.

Marie-Pierre Albouy-Duclercq, responsable des partenariats d’Earthworm Foundation
Quelles sont les missions d’Earthworm Foundation ?
Cette organisation internationale à but non lucratif travaille dans de nombreux pays, dont la France, pour fédérer les acteurs de l’amont et de l’aval dans un seul but : accompagner les acteurs des filières pour un changement de pratiques visant à régénérer et améliorer la santé des sols. En tant qu’organisme neutre, il joue donc un rôle de catalyseur pour faire travailler ensemble tous les maillons de la chaîne, des agriculteurs et coopératives aux distributeurs.
D’où est né le partenariat avec Terres Inovia ?
L’objectif de Protéi’Sol est de structurer la filière des légumineuses locales, tout en renforçant la résilience agricole et en promouvant des pratiques durables dans les Hauts-de-France. Ce projet, qui bénéficie du soutien financier de l'Union européenne et de la Région Hauts-de-France, avait besoin d’un appui fort sur le terrain, au cœur des bassins de production. C’est justement le rôle de Terres Inovia comme partenaire technique sur le projet.
En quoi consiste ce rôle ?
L’institut forme 30 agriculteurs et 6 techniciens de la coopérative Noriap aux pratiques agroécologiques dans le cadre du programme Cap Agronomie®. Depuis juin 2024, l’institut technique les accompagne pour une durée de deux ans, avec une session tous les deux-trois mois, sur le terrain.
Sur quoi l'institut les accompagne ?
Essentiellement l’implantation et le suivi des légumineuses (tels que le pois et la féverole) durant tout le cycle de culture, toujours avec une vision systémique de l’exploitation et un élargissement à la fertilité des sols. Il s’agit aussi de redonner goût à la culture des légumineuses. Ce sont des espèces qui peuvent être complexes à produire, tout l’enjeu est de leur donner confiance dans ces cultures.
Qu’est-ce que Cap Agronomie® apporte au projet Protéi’Sol ?
Ces formations très concrètes permettent de diffuser toutes les connaissances techniques sur les légumineuses. Le savoir-faire technique ayant été perdu, il y a un réel besoin d’accompagnement pour rassurer les agriculteurs sur ces cultures et sur leur rentabilité à l’échelle du système. Cet accompagnement est particulièrement abouti, fait sur-mesure car il y a un suivi tout au long de la campagne et il permet aussi une montée en compétence des techniciens de Noriap. C’est une belle plus-value apportée au projet.
L’une des forces de Protéi’Sol, c’est aussi le lien important avec l’aval de la production ?
Oui, c’est un projet co-construit et financé en partenariat, avec à ce jour 4 entreprises : Auchan, Lidl, Purina et les Mousquetaires. Ce lien entre l’amont et l’aval permettra de rassurer les agriculteurs sur la valorisation des débouchés de leurs productions pour l’alimentation animale. Les enseignes cherchent en effet à expérimenter des alternatives locales au tourteau de soja importé.
Ce projet est coordonné par Earthworm et bénéficie du soutien financier de la Région Hauts de France et de l’Union Européenne.
Chiffres clés
|
Agroécologie : Terres Inovia signe un partenariat en formation continue avec UniLaSalle
L’institut technique a officialisé, le 3 juin dernier, un accord de partenariat de trois ans avec l’école d’ingénieurs UniLaSalle. Il vise à valoriser l’expertise de l’institut technique autour des enjeux de l’agroécologie auprès des agriculteurs, des techniciens et des coopératives.
Le 3 juin dernier, dans les locaux d’UniLaSalle Beauvais, Laurent Rosso, directeur général de Terres Inovia, et Stéphanie Pineau, directrice des Relations Entreprises d’UniLaSalle, ont signé un partenariat stratégique pour renforcer les enseignements dans les programmes de formation continue de cette école d’ingénieurs.
Des formations dispensées par Terres Inovia sur l’agroécologie
« Terres Inovia s’engage à concevoir, animer et dispenser des formations en lien avec ses domaines de compétences. De son côté, UniLaSalle intégrera ces formations au sein de ses parcours de formation continue, selon les besoins identifiés et les ressources disponibles », a annoncé UniLaSalle.
Les formations dispensées par l’institut technique sont orientées autour de l’agroécologie pour accroître les compétences des acteurs agricoles dans ce domaine. Concrètement, deux experts de Terres Inovia, Matthieu Loos, chargé de développement, et Maxime Bécu, responsable du département Expérimentation, animeront des modules de formations continues et certifiantes destinées aux agriculteurs, aux conseillers techniques et aux coopératives. « Ils vont intervenir sur toutes les thématiques liées à l’agroécologie, comme les couverts végétaux, les accidents climatiques sur les cultures et la fertilité du sol, pour un volume horaire moyen de 30 heures par an », précise Elise Odinot, responsable des formations externes de Terres Inovia.
Quels enjeux pour Terres Inovia ?« Ce partenariat stratégique permet de faire valoir notre expertise auprès des acteurs agricoles. Il montre le gage de sérieux et de crédibilité de notre institut. Il nous permettra aussi de mieux voir les problématiques vécues sur le terrain et d’adapter, en conséquence, nos propres formations ». |
Les effets bénéfiques des légumineuses pour des pratiques agricoles durables
Terres Inovia a partagé les résultats de travaux dans le cadre du projet européen Climate Farm Demo, confirmant les atouts des légumineuses pour des pratiques agricoles durables. Un webinaire à destination des conseillers techniques a même été organisé le 30 avril dernier.
Lancé en 2022, Climate Farm Demo est un projet européen visant à accélérer l'adoption de pratiques agricoles vertueuses pour atteindre la neutralité carbone d'ici 2050. Coordonné par l’Idele, il réunit 81 partenaires (dont Terres Inovia) dans 28 pays.
Dans le cadre de ce projet, un webinaire destiné aux conseillers techniques a été organisé, le 30 avril dernier, pour mettre en avant les effets bénéfiques des légumineuses pour des pratiques agricoles durables. Objectif : accompagner la transition climatique des agriculteurs européens, en particulier les 1500 producteurs qui sont partenaire du projet.
Visualisez le webinaire
Ces résultats portent principalement sur les effets bénéfiques des légumineuses en matière de fixation de l’azote, d’émissions de gaz à effet de serre (GES) et de rendement des cultures suivantes. Ils sont issus d’essais réalisés par Terres Inovia, Arvalis,l’INRAE et l’ADAS.
Une fixation symbiotique de l’azote par les légumineuses
Ces cultures permettent une fixation symbiotique de l’azote et peuvent donc être cultivées sans qu’il soit nécessaire de recourir aux engrais azotés. Selon les espèces de légumineuses, la fixation représente de 40 à 90% de l’azote présent dans ces cultures.
Une réduction des gaz à effet de serre (GES)
Les cultures de légumineuses émettent 70 à 80 % en moins de GES que les cultures à fort intrant azoté (blé, maïs, colza). L’empreinte carbone moyenne est inférieure à 1000 kg éqCO₂/ha par exemple pour le pois, la féverole et le soja. Les émissions de GES sont également réduites sur la culture suivante grâce à la baisse des apports d'engrais (-230 kg éqCO₂/ha pour un blé suivant pois par exemple).
Les effets positifs sur le rendement des cultures suivantes
• En agriculture conventionnelle
Le blé après une légumineuse augmente son rendement de +0,3 à +1,2 t/ha comparé à un blé après céréale. Les pratiques de fertilisation sont peu différenciées entre les précédents culturaux alors qu’il y a un potentiel de réduction de la dose d’engrais après une culture légumineuse.
• En agriculture biologique
Le gain de rendement est de +1,0 à +2,2 t/ha.
En résuméLes résultats présentés dans le cadre du projet Climate Farm Demo confirment que l’intégration de légumineuses dans les rotations culturales : |
En savoir plus sur le projet Climate Farm Demo
Les comités régionaux d’Adaptacol² à l’honneur
Pour apporter des solutions alternatives, en priorité non chimiques, face à l’interdiction possible d’un certain nombre de substances actives, les pouvoirs publics ont lancé, dès le printemps 2023, un plan d’action destiné à identifier de nouveaux leviers de gestion des bioagresseurs : le Plan d’action stratégique pour l’anticipation du potentiel retrait européen des substances actives et le développement de techniques alternatives pour la protection des cultures (PARSADA).
Terres Inovia participe à plusieurs projets intégrés dans ce plan : Gramicible, Decclic, Parad et ACOMPLI, ASAP, ARDECO en tant que partenaire, ainsi que Gramicombi en tant que porteur. D’autres projets sont en phase d’évaluation : COLEOFAST et ALTIFAST.
PARSADA : réfléchir aux approches méthodologiques
Les 3 et 4 avril, l’Acta avait organisé un séminaire sur « Comment optimiser l’impact des projets PARSADA ? ». Objectif : réfléchir aux stratégies de déploiement et aux approches méthodologiques à privilégier pour optimiser l’appropriation des innovations pour les projets de R&D. Le séminaire a mixé apports théoriques, témoignages, retours d’expériences et ateliers de travail sur les cibles et les impacts.
L’animation de comités régionaux dans le cadre du projet Adaptacol² a été présentée comme un exemple inspirant pour augmenter l’impact sur un programme de R&D, en l’occurrence le Plan d’action de sortie du phosmet. « La création de comités régionaux a permis de mobiliser une centaine d’acteurs sur le territoire et d’obtenir des résultats concrets, avec par exemple 420 essais mis en place, 34 plateformes de démonstration et 109 conseillers formés notamment », a précisé Aurore Baillet, ingénieure de développement de Terres Inovia et animatrice des comités régionaux, lors de ce séminaire.
Visionner la présentation
En savoir plus sur les projets
Mais aussi :
- ACOMPLI : Acquisition d’Outils et Méthodes de Protection des cultures contre les Lépidoptères en Interfilières (porteur : UNILET)
- ASAP : Anticipation et Surveillance de l’Adaptation des bioagresseurs aux méthodes de lutte en période de diminution du nombre de substances actives Pesticides (INRAE)
- ARDECO : Anticiper les Retraits des substances phytosanitaires par le Développement d’une infrastructure distribuée d’Ecologie Chimique Opérationnelle, générique et haut débit (porteur : INRAE )
- COLEOFAST : Fédérer et Accompagner la recherche de Solutions Techniques innovantes pour protéger les cultures contre les COLEOptères (porteur : FNAMS )
- ALTIFAST : Fédérer et Accompagner la recherche de Solutions Techniques innovantes pour protéger les cultures contre les ALTises (porteur : Terres Inovia )
Lancement du projet CONCERTO
Officiellement terminé depuis mars 2024, le projet R2D2 poursuit son engagement auprès des producteurs dans le cadre d’un nouveau projet DEPHY EXPE intitulé Concerto . Si le collectif et les axes de travail restent inchangés, le projet se renouvelle et tire parti des enseignements obtenus après 6 ans d’expérimentation et d’accompagnement au changement.
Créer des conditions favorables au changement de pratiques
Avec le projet CONCERTO, l’ambition initiale du projet R2D2 est réaffirmée pour 6 ans sur le territoire d’un millier d’hectares situé sur les plateaux de bourgogne : obtenir des systèmes plus résilients vis-à-vis des dégâts d’insectes et aider les agriculteurs à se passer progressivement d’insecticides sur l’ensemble des cultures de la rotation.
Pour y parvenir, la stratégie globale reste identique : accompagner le collectif dans le but de créer des conditions favorables au changement de pratiques et à l'aménagement du paysage.
Elle se décline en 3 axes de travail complémentaires : le déploiement de leviers agronomiques pour des cultures plus robustes, le renforcement des processus de régulation biologique des principaux ravageurs et la mise en œuvre de techniques de manipulations comportementales des ravageurs par l’utilisation de plantes de services.
Un accroissement de la résilience des systèmes
Concerto offre une approche innovante et originale qui s’appuie sur les principes suivants :
• La concertation entre agriculteurs du territoire afin de converger vers un objectif commun
• La mise en œuvre de leviers à effets partiels imbriqués de l’échelle de parcelle à l’échelle du paysage
• La dynamisation des processus biologiques à différentes échelles : vie du sol, régulations naturelles des bioagresseurs
Il vise ainsi l’accroissement de la résilience des systèmes sans compromettre leurs performances
Ce qui change
La Ligue de Protection des Oiseaux (LPO) et le Centre Permanent d’Initiatives pour l’Environnement (CPIE) ont rejoint l’aventure aux côté de Terres Inovia, pilote du projet, et de la Chambre d’agriculture de l’Yonne.
Ces nouveaux acteurs du territoire vont renforcer l’accompagnement des agriculteurs autour des questions de biodiversité et favoriser ainsi la création et l’entretien d’habitats semi-naturels favorables aux oiseaux, ennemis naturels des ravageurs, insectes pollinisateurs. Des diagnostics réalisés dans les fermes suivis de préconisations vont permettre à chaque agriculteur de s’inscrire dans le projet collectif.
L’accompagnement agronomique des agriculteurs reste une pierre angulaire de la démarche. Il intègrera désormais une nouvelle composante : la gestion de la fertilité des sols. Sur la base d’un bilan initial, il s’agira, pour chaque agriculteur, d’établir une feuille de route qui lui permette de restaurer progressivement l’équilibre entre les principaux compartiments de la fraction organique de son sol pour un fonctionnement optimal. À l'instar des actions menées pour favoriser les régulations biologiques, ce travail s’inscrit dans une recherche d’autonomie vis-à-vis des intrants chimiques et de résilience face aux aléas.
Journée PNDAR/Casdar : Syppre, le pari de l’agroécologie pour atteindre la multiperformance
A l'occasion des rencontres annuelles PNDAR/Casdar du 4 février, Terres Inovia a présenté le projet multipartenarial Syppre.
Depuis 2011, des rencontres PNDAR/Casdar sont organisées annuellement par le GIS Relance agronomique afin de valoriser les résultats des lauréats des appels à projets et des appels à programmes. Depuis 2020, ces journées sont devenues thématiques et cette année la journée était dédiée à "10 ans d'agroécologie : évolution & perspectives". Dans ce cadre, Terres Inovia a présenté Syppre.
Pour consulter l'historique des Rencontres PNDAR/Casdar, rendez-vous sur le site du ministère de l'Agrigulture, de la Souveraineté alimentaire et de la forêt : ici.
Contact : S. Cadoux, s.cadoux@terresinovia.fr
Documents à télécharger
R2D2 : le bilan de cinq ans d’expérimentations
Le projet R2D2 est maintenant terminé. Quels sont les principaux résultats et enseignements de ce projet innovant de gestion agroécologique des ravageurs en grandes cultures ?
Initié en 2018, le projet R2D2, piloté par Terres Inovia, a accompagné un collectif de 10 agriculteurs dans une transition vers des systèmes agricoles plus résilients et durables.
Il s’agissait de mettre en œuvre à l'échelle d'un territoire de 1 300 ha en Bourgogne une stratégie de gestion agroécologique des ravageurs de cultures par une combinaison de leviers agronomiques à la parcelle, mais aussi d'aménagements paysagers pour favoriser les insectes auxiliaires. « La finalité était d'essayer de passer d'une gestion des ravageurs individuelle et curative à la parcelle principalement basée sur la chimie à une gestion concertée, préventive à l'échelle d'un territoire combinant l'agronomie aux principes de la lutte biologique par conservation », précise Nicolas Cerrutti, chargé d’études en biodiversité fonctionnelle chez Terres Inovia.
Le point de départ : de l’impasse technique à la mobilisation collective
Le territoire du projet R2D2 se situe dans l’Yonne, l’épicentre de la résistance de l’altise d’hiver et du charançon du bourgeon terminal aux insecticides pyréthrinoïdes.
Les exploitations agricoles du secteur ont été fortement impactées, contraintes de réduire voire d’abandonner le colza, une culture centrale dans les assolements et pour l’équilibre économique des structures. Les rendements et surfaces en chutes libres ont amené un découragement général.
Cependant, l’impasse technique rencontrée par les agriculteurs a finalement constitué un terreau fertile pour l’impulsion d’une dynamique de changement, avec le projet R2D2.
Retrouver de bons niveaux de rentabilité, relancer la culture du colza et se passer d’insecticides a été l’objectif visé par les agriculteurs qui ont participé au projet.
Pendant cinq ans, le projet a été rythmé de rencontres techniques, de formations, d’ateliers de travail ou encore de voyages d’études. Cet accompagnement a permis d’apporter aux agriculteurs des éléments techniques sur des thématiques nouvelles (régulations biologiques, lutte biologique par conservation, connaissance des insectes…) et de favoriser l’écoute et le partage d’expérience nécessaires pour motiver l’exploration de nouvelles voies en toute sérénité.
Un agriculteur suisse présente ses surfaces de promotion de la biodiversité aux agriculteurs du projet R2D2 lors d’une journée technique (Crédit : N. cerrutti)
Une stratégie qui combine plusieurs leviers
Les agriculteurs ont mobilisé l’ensemble des pratiques agronomiques connues et efficaces pour renforcer la résilience du colza face aux attaques d’insectes.
En concertation, ils ont également imaginé de nouveaux leviers préventifs à grande échelle et les ont intégrés dans une stratégie basée sur les principes de l’agroécologie reposant sur trois axes de travail :
- Favoriser les insectes auxiliaires pour améliorer le contrôle biologique des insectes ravageurs: création d’habitats semis-naturels, augmentation des ressources fleuries sur le territoire.
- Limiter les dégâts de ravageurs sur le colza et réduire leurs populations : c'est la technique des intercultures pièges pilotées.
- Optimiser le parcours de croissance du colza pour réduire la nuisibilité des attaques d’insectes : semis avant le 15 août, association avec la féverole, fertilisation au semis, choix d’une variété vigoureuse au démarrage.
Un niveau de rendement multiplié par deux sur le colza
L’accompagnement a porté ses fruits. En moyenne, sur la période 2019-2023, les surfaces de colza du territoire de travail de R2D2 ont plus que doublé (+120 %). De plus, les rendements ont progressé et se sont stabilisés autour de 3 t/ha alors qu’ils étaient proches de 1,5 t en 2019.
L’Indice de Fréquence de Traitement insecticide a été réduit de 29 % entre la période 2019-2020 et 2021-2023 car les traitements insecticides systématiques -qui concernaient 60 % des surfaces de colza au démarrage du projet- ont été supprimés par le collectif. Depuis 2021, les niveaux de pression des ravageurs d’automne ont été relativement bas et en dessous des seuils indicatifs de risque.
La prise de risque, un frein à la reconception des systèmes
Les couverts d’interculture piège et les pratiques pour obtenir un colza robuste ont été adoptés rapidement, massivement et durablement par les exploitants. « Ils ne présentent pas à leurs yeux de risques particuliers tandis que les gains potentiels sont relativement bien perçus », précise Nicolas Cerrutti.
En revanche, des freins demeurent pour les leviers qui exigent des changements plus profonds dans les systèmes. Ainsi, les six agriculteurs qui ont implanté des bandes fleuries multi-espèces ne souhaitent pas aller au-delà des 8 ha qu’ils ont initialement mis en place. « S’ils perçoivent bien l’intérêt de ces habitats pour la faune auxiliaire, ils regrettent de ne pas pouvoir évaluer les gains de production directement liés à ces aménagements qui prennent la place de surfaces cultivables », explique Nicolas Cerrutti. De plus, le maintien des fonctionnalités écologiques de ces espaces sur le long terme nécessite un entretien régulier surtout les premières années : les planter ne suffit pas.
Le projet met donc en évidence la nécessité de mobiliser des dispositifs financiers d’accompagnement à la prise de risque des agriculteurs ou de rémunération des services environnementaux. « Cela permettrait d’aller plus loin dans la reconception des systèmes ».
Les expérimentations initiées dans le projet R2D2 vont se poursuivre dans un autre projet, qui démarrera courant 2025.
- Retrouvez le suivi du projet
- Projet R2D2 : de la parcelle agricole au paysage, gérer collectivement les insectes phytophages en grandes cultures
- Jeudi de TI : Atténuer les dégâts des ravageurs et réduire les insecticides, les résultats du projet R2D2
- Arvalis terres Inovia Infos : "déployer des leviers préventifs et innovants à grande échelle"
- Arvalis Terres Inovia Infos : "Intercultures pièges, une nouvelle gestion territoriale des altises d'hiver"
Colza associé : les travaux de l’institut valorisés
Lors d’un séminaire sur les plantes de services, organisé par l’INRAE les 21 et 22 novembre à Paris, Terres Inovia a pu présenter ses nombreux travaux sur le colza associé comme levier agroécologique pour lutter contre les bioagresseurs.
Comment les pratiques agroécologiques peuvent permettre de réduire l’impact de bioagresseurs tels que les adventices, les ravageurs et, globalement, tous les parasites et pathogènes?
Le séminaire, organisé par l’INRAE les 21 et 22 novembre 2024 à Paris sur le thème des plantes de services visait justement à rassembler des chercheurs et des partenaires des filières afin d’échanger les visions, de donner à voir les travaux et initiatives en cours, de partager résultats et concepts, et si possible de dégager des pistes de collaboration pour le futur.
Comprendre pourquoi le colza est associé à des légumineuses
Terres Inovia était présent à cet événement pour valoriser ses travaux, conduits depuis de nombreux années, sur la pratique du colza associé à des légumineuses gélives, comme levier agroécologique afin notamment de mieux faire face aux bioagresseurs. « Les enquêtes pratiques culturales de Terres Inovia nous permettent de mieux comprendre pourquoi et comment sont utilisées des légumineuses en association avec le colza », a expliqué Stéphane Cadoux, responsable du département agronomie, économie et environnement (DAGRO), qui était venu présenter les travaux de l’institut.
Une pratique qui progresse chez les agriculteurs
Depuis 2014, les surfaces de colza conduites en association avec des légumineuses gélives ont fortement augmenté jusqu’à atteindre un pic de 20 % en 2020 et 2022. « La lutte contre les dégâts d’insectes est le premier service recherché par les agriculteurs (pour plus de 80% des surfaces de colza associé), devant la couverture du sol et les économies d’azote. Le colza est une culture qui bénéficie d’une vraie dynamique d’innovation mobilisant les plantes de services », a-t-il souligné.
Stéphane Cadoux a également rappelé qu’à Terres Inovia la technique des colzas associés s’inscrit dans une vision plus globale d’usage des plantes de services et de stratégie de conduite agroécologique au service de la robustesse et de la performance de la culture. En effet des travaux sont en cours dans l’institut pour mettre au point avec des agriculteurs des stratégies territoriales concertées de gestion des ravageurs du colza.
Celles-ci consistent à combiner des leviers pour obtenir un colza robuste, intégrant l’association avec des légumineuses gélives, la mise en place de couverts d’interculture pièges à altises aux abords des parcelles de colza et des infrastructures agroécologiques pour favoriser les régulations naturelles des ravageurs.
Ces nouvelles approches territoriales sont prometteuses et soulèvent de nombreuses questions, notamment sur l’évaluation et la valorisation des services rendus à l’échelle du territoire.
Plus d'informations
Bénéfices et conduite du colza associé à des légumineuses
Point technique colza associé
Documents à télécharger
Terres Inovia se mobilise pour la fertilité des sols
Lors de la 22éme conférence de l’ISTRO, qui s’est tenue au 22 au 27 septembre à Virginia Beach (Etats-Unis), Terres Inovia a pu valoriser ses travaux pour améliorer la fertilité des sols.
La réussite de l’implantation et la fertilité des sols, des axes forts de recherche pour l’institut
"Living roots, living soils", racines vivantes, sols vivants : tel était le thème de la 22ème conférence de l’ISTRO, l’organisation internationale de recherche sur le sol et le travail du sol. Or, Terres Inovia a fait des cultures robustes un marqueur et de la réussite de l’implantation et de la fertilité des sols ses piliers.
L'institut ne pouvait donc pas manquer ce rendez-vous international. Domitille Jamet, chargée d’études systèmes de culture et agronomie, Michael Geloen, ingénieur de développement, et Stéphane Cadoux, responsable du département agronomie, économie et environnement, se sont donc rendus à Virginia Beach, aux Etats-Unis, du 22 au 27 septembre.
Favoriser la durabilité des systèmes de production
La conférence a permis de partager des travaux très variés autour de l’amélioration de la fertilité des sols, du travail du sol ou encore des couverts végétaux pour favoriser la durabilité des systèmes de production de grandes cultures.
La conférence a accueilli 150 personnes issues de la recherche et du développement. Au total, 200 travaux y ont été présentés sous forme de posters ou de présentations orales. Une grande diversité de contextes agricoles a pu être détaillée, puisque 35 pays différents, sur les 5 continents, étaient représentés
Posters et présentations orales ont animé la 22éme conférence d'ISTRO
De l’agriculture régénératrice à la sécurité alimentaire
La conférence de l’ISTRO était organisée autour de différentes thématiques, plutôt techniques, telles que le travail du sol, la gestion du sol et de la ressource en eau, la biologie du sol, la protection des cultures, la fertilité et la nutrition des plantes. D’autres sujets plus généraux ont aussi été abordés, comme l’agriculture régénérative, le respect de l’environnement, la recherche participative et le développement agricole, la sécurité alimentaire mondiale ou encore l’agriculture de précision.
Des journées terrain
La journée de terrain qui a suivi a été l’occasion pour les participants de découvrir les systèmes de production locaux, basé sur des systèmes maïs-soja, ainsi que des dispositifs de R&D comme une station d’expérimentation sur les couverts végétauxet la politique de d’accompagnement des agriculteurs à la mise en place de couverts aux Etats-Unis.
Une présentation lors de la journée terrain organisée par l'ISTRO
Quels travaux présentés par Terres Inovia ?
Cette conférence a permis à Terres Inovia de partager ses travaux menés sur les couverts végétaux, les méthodes d’évaluation et de pilotage de la fertilité des sols, les travaux d’accompagnement de groupes d’agriculteurs innovant sur ces thématiques ou encore sur les essais systèmes de culture.
Michaël Geloen a présenté les travaux d'accompagnement d'agriculteurs du réseau Magellan
Domitille Jamet a détaillé les travaux du réseau de systèmes innovants Syppre
L’institut a pu expliquer les principes de la méthode test bêche développée par Terres Inovia, qui fait écho à d’autres méthodes d’évaluation de la structure du sol portées par des membres de l’ISTRO. A noter que la méthode de l’institut se démarque par sa simplicité d’utilisation et son lien avec un conseil opérationnel de travail du sol.
Plus d'informations sur le test bêche
La démarche et les outils d’accompagnement de groupes d’agriculteurs, mis au point avec le GIEE Magellan, et déployés plus largement par Terres Inovia pour accompagner la transition agroécologique des exploitations agricoles, notamment au travers du service Cap Agronomie® ont aussi été présentés.
Plus d'informations sur Cap Agronomie
Plus d'informations sur le GIEE Magellan
Les experts de Terres Inovia ont également mis en avant l’utilisation de l’outil tableau de bord pour piloter l’amélioration de la fertilité des sols en exploitation agricole, à partir des travaux réalisés dans le cadre du projet Transi’sols avec des groupes d’agriculteurs.
Plus d'informations sur le projet Transi'sols
Egalement, les essais des systèmes de culture innovants Syppre et des stratégies conçues pour améliorer la fertilité des sols, et les résultats de performance de ces systèmes, ont été détaillés.
Plus d'informations sur Syppre
L’institut technique a mis aussi à la disposition des participants un poster sur la conduite des couverts semi-permanent, et les intérêts de cette pratique pour le système (fertilité des sols, gestions des adventices…) à partir des travaux menés avec le GIEE Magellan.
Autre poster présenté : l’approche Biofunctool, développée par l’IRD et CIRAD, qui propose des mesures simples et faisables au champs pour une évaluation globale de la capacité du sol à fournir des services. Elle est utilisée aujourd’hui par Terres Inovia pour évaluer l’effet de pratiques agronomiques, telle que les couverts végétaux, sur la fertilité des sols.
Retrouvez les posters présentés par Terres Inovia en pièces jointes
Documents à télécharger
S'inscrire avec Facebook
S'inscrire avec Google