Stratégie fongicide féverole : prendre en compte la réglementation
Les récents retraits des spécialités à base de chlorothalonil (fin d’utilisation 20 mai 2020) modifient les programmes historiques de gestion du botrytis et de la rouille de la féverole. C’est plus de la moitié de la gamme de protection qui disparaît et la lutte contre ces maladies se recentre autour de l’azoxystrobine, le Prosaro et le Scala*.
*Attention, suite à la publication de l'arrêté Abeilles du 20 novembre 2021, en période de floraison, sur culture attractive, les applications de produits fongicides doivent être réalisés dans le créneau horaire suivant : dans les 2 heures qui précèdent le coucher du soleil et dans les 3 heures qui suivent le coucher du soleil (plus d'informations sur le site internet de Terres Inovia).
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Lutter préventivement contre les maladies grâce au traitement de semences
L’ascochytose causée par Ascochyta fabae est une maladie qui peut être transmise par des semences contaminées. Pour limiter le développement d’un inoculum primaire, l’utilisation de lots de semences saines et le traitement de ces semences sont primordiaux. Un produit est homologué : Wakil XL à 0,1 kg/q.
Ascochytose sur feuille de féverole.
Ce produit est également efficace contre les fontes de semis et les nécroses racinaires précoces (Fusarium sp, Phoma sp, Rhizoctonia sp, Pythium sp).
La protection contre le mildiou (Peronospora viciae) est également assurée par le traitement de semences Wakil XL à 0,1 kg/q. Il n’existe aucun traitement efficace en végétation.
Place de la féverole dans la rotation vis-à-vis des maladies
Un délai de 6 ans minimum est préconisé entre deux féveroles afin de limiter les risques sanitaires. Il est recommandé d’éviter les couverts de féverole lorsque cette espèce est déjà présente en culture de rente dans la parcelle. Un couvert de féverole ne doit pas jamais précéder une féverole.
La féverole est une légumineuse très résistante à l’aphanomyces (Aphanomyces euteiches) et elle ne multiplie pas le pathogène dans le sol. Alterner pois et féverole dans les parcelles saines ou faiblement contaminées permet de préserver l’état sanitaire du sol. Lorsque la parcelle est fortement contaminée, la féverole peut remplacer le pois.
Semis de féverole de printemps
La féverole de printemps peut être semée très tôt dans le sud, dès début janvier et, de mi-février à mi-mars dans le nord du pays. Un sol gelé peut lui convenir, l’essentiel étant de bien pouvoir positionner la graine à la profondeur souhaitée. En bordure maritime nord-Ouest, la féverole de printemps est plus appropriée.
Comme en féverole d’hiver, plus le semis est précoce plus il est conseillé de positionner la graine entre 6 et 8 centimètres de profondeur. En retardant le semis, le positionnement est plus superficiel, 4 à 5 centimètres, l’objectif étant de limiter les dégâts d’oiseaux et la sélectivité des produits de pré levée.
La densité de semis se situe entre 40 et 50 graines par mètre carré, cette dose est diminuée en semis écarté de 10 à 15 %.
Le semis se fait à vitesse assez réduite, 7 à 8 kilomètres par heure pour assurer le bon positionnement de la graine.
Date de semis optimale de la féverole de printemps bio
Préparation du sol pour la féverole de printemps
L’enracinement des légumineuses est très sensible aux accidents de structure du sol.
Travail du sol
Pour que les nodosités puissent se développer rapidement et en nombre suffisant, le sol doit être aéré et non compacté dès les premiers centimètres.
Il convient donc de travailler le sol profondément pour le fragmenter et éviter les ruptures de porosité qui limitent l’aération, ralentissent la progression verticale des racines ainsi que la circulation de l’eau.
Un travail avec un outil à dents de 10 à 15 centimètres de profondeur ou un labour selon le type de sol sont conseillés. Ce travail est fréquemment réalisé en hiver, sur un sol ressuyé. L’intervention sur sol ressuyé ou légèrement gelé est à privilégier. C’est l’occasion de détruire le couvert implanté en interculture, si ce n’est déjà fait. Un passage de rouleau en situation sèche et/ou gélive peut s’avérer utile avant le travail. Les alternances gel, dégel et sec, humide permettent l’effritement des mottes et facilitent une reprise superficielle juste avant ou au moment du semis.
Le lit de semence n’a pas besoin d’être très fin. Le sol doit être bien ressuyé au moment du semis, il est donc préférable de décaler la date de semis pour intervenir au moment le plus opportun. En cas d’application de produit de désherbage de pré-levée, le lit de semence ne doit pas être trop motteux pour éviter de nuire à l’efficacité du produit.
Dans les situations très bien structurées, l’absence de travail est envisageable. Toutefois, il est conseillé de prendre connaissance de l’état structural de la couche labourable pour prendre cette décision. Pour cela un test bèche ou l’utilisation d’un pénétromètre donneront l’information nécessaire à la prise de décision.
Le couvert est alors détruit soit par le gel ou bien « mulché » juste avant le semis par un passage de rouleau ou de herse rotative. Les résidus en surface limitent les risques d’érosion et ne doivent constituer un obstacle au bon fonctionnement du semoir.
Absence de travail du sol
Un semoir de semis direct à dents ou disques est bien adapté, sous condition de bien positionner la graine à la profondeur choisie.
L‘utilisation du strip-till est également envisageable. Le fractionnement de la ligne de semis est très favorable à la croissance du pivot et des racines. Il est souhaitable d’être attentif au positionnement de la graine qui doit être assez profond (au moins 5 centimètres).
Il convient d’être très attentif à l’état hydrique de surface et de n’intervenir qu’en situation bien ressuyée.
Qualité des graines de féverole 2024
Terres Univia confie chaque année à Terres Inovia la réalisation d’une enquête sur la qualité des graines de féverole à la collecte, avec la collaboration d’organismes collecteurs qui fournissent des échantillons.
Les surfaces de féverole en France en 2024 sont du même niveau qu’en 2023, de l’ordre de 80 000 ha. Le rendement moyen national, estimé en décembre 2024, est également proche de celui de l’an dernier (26,9 q/ha contre 27,5 q/ha). Il pourrait cependant évoluer à la hausse compte tenu des bons rendements enregistrés dans plusieurs zones de culture. Il en résulte une production chiffrée à 215 000 t contre 220 000 t en 2023 qui pourrait être aussi revue à la hausse.
Teneur en protéines : 28,3%
Teneur en eau : 13,7%
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En période de mi-floraison, la féverole a besoin d’eau !
A partir de la fin de la floraison jusqu’à la maturité physiologique, la féverole a besoin de 180 mm d’eau (contre 150 mm pour le pois).
Si l’irrigation est possible, la féverole valorise bien l’eau apportée. Les besoins en eau de la féverole de printemps sont de 300 mm environ pour un rendement de 60-70 q/ha. Elle est sensible au déficit hydrique
En effet, la période de floraison et de formation des graines est relativement longue : de fin mai à mi-juillet suivant les secteurs géographiques. Le gain de rendement permis par l’irrigation est comparable à celui obtenu avec le pois : 4,5 à 6 q/ha pour 30 mm apportés.
Néanmoins, il ne faut pas irriguer avant la mi-floraison (sauf sécheresse très précoce), cela favoriserait un développement de végétation excessif, qui pénaliserait la formation des gousses par la suite. Il faut poursuivre les apports d’eau jusqu’au stade fin floraison + 20 jours.
Consommation en eau de la féverole et du pois (en mm)
| Période | Féverole | Pois |
| 7 feuilles à début floraison | 40 | 70 |
| Début à fin floraison | 80 | 80 |
| Fin floraison à maturité | 180 | 150 |
| Total (7 feuilles à maturité) | 300 | 300 |
En début de cycle, la féverole n’est pas exigeante en eau
Féverole et pois ont les mêmes besoins totaux en eau durant leur cycle. Cependant, des différences existent entre les deux espèces selon les phases. En début de cycle, la féverole n’est pas très exigeante en eau, alors qu’après la fin de la floraison (voir l'article) et jusqu’à maturité physiologique, elle nécessite 180 mm d’eau (contre 150 mm pour le pois).
Consommation en eau de la féverole et du pois (en mm)
| Période | Féverole | Pois |
| 7 feuilles à début floraison | 40 | 70 |
| Début à fin floraison | 80 | 80 |
| Fin floraison à maturité | 180 | 150 |
| Total (7 feuilles à maturité) | 300 | 300 |
Stockage de la féverole
Contrôler la température et l’humidité
Lors de l’arrivée en stockage, la température des graines de féverole peut être très élevée (> 35°C) ! Pour assurer une bonne conservation, ventiler l'air ambiant dès la mise en silo pour abaisser rapidement la température vers 18-20°C dans un premier temps (ventilation de nuit souhaitable), puis abaisser la température si possible en-dessous de 10°C avec 2-3 ventilations supplémentaires pour une conservation sur une longue durée.
Contrôler également l’humidité des graines, et réaliser si besoin un séchage pour baisser progressivement le taux d’humidité en-dessous de 14 % (qui est la norme commerciale) pour une conservation sur la durée.
Eviter la casse des grains
Le taux de graines cassées est un critère de qualité pour la féverole. Toutes les étapes de manutention peuvent avoir un impact négatif sur ce critère (récolte, réception sur site de stockage, élévateur, circuits de manutention). Il faut donc veiller si possible à réduire les hauteurs de chute, et éviter des chocs directs sur les parois, si possible avec du matériel adapté.
Un pH neutre et une teneur en bore à surveiller
Pour que la féverole se développe convenablement, elle a besoin d’un sol dont le pH est compris entre 6 et 7.
pH acide : la féverole supporte mal les sols acides au pH < 5,5, qui entravent le fonctionnement de l’activité symbiotique.
pH élevé : si le pH > 7,5, particulièrement dans les sols de limons battants à tendance hydromorphe, certains éléments minéraux comme le bore sont bloqués. Ce problème pourrait être à l’origine des féveroles sans gousses résultant d’un problème de fécondation des fleurs (Aisne, Ardennes, Marne et Seine-et-Marne). Dans ces parcelles à risque, en cas de printemps froid et humide, apporter 300 g/ha d’éléments bore au stade boutons floraux de la féverole pour assurer une bonne fécondation.