Pluies de fin de printemps : opportunités et risques pour les implantations de colza
Semer de la graine de ferme issue de colza hybride : la fausse bonne idée !
Dans un contexte économique tendu, certains agriculteurs souhaitent bénéficier du progrès génétique apporté par les colzas hybrides sans pour autant supporter l’investissement de la semence certifiée de l’ordre de 40 €/ha. Les questions sur le re-semis de colza hybride sont fréquentes et la pratique progresse même si elle demeure minoritaire : 5% des graines de ferme proviennent de semences d’hybrides restaurés d’après l’enquête sur les pratiques culturales du colza conduite en 2018 par Terres Inovia.
Au-delà de l’interdiction réglementaire, cette pratique conduit à une baisse du potentiel de production de 15% en moyenne par rapport au semis d’un hybride en semence certifiée. Les pertes de rendement avec de la graine de ferme d’un hybride prélevé par rapport à la semence certifiée sont toutefois très variables. On constate des écarts allant de 1.6 à 14,9 q/ha dans un réseau de 31 essais conduits entre 2015 et 2019 par Terres Inovia et les partenaires en régions.
Rendements des graines de ferme issues de colzas hybrides exprimés en pourcentage des rendements des semences certifiées
(31 essais réalisés par Terres Inovia et ses partenaires entre 2015 et 2019)
Perte de rendement occasionnée par un semis de graines de ferme issues de colzas hybrides : rendement hybride semence certifiée - rendement hybride prélevé
(31 essais réalisés par Terres Inovia et ses partenaires entre 2015 et 2019)
Dans ce référentiel, la perte moyenne de rendement est de 7 q/ha soit une moins-value économique de l’ordre de 200 €/ha (rendement x prix de graines – coût semences). On peut noter au passage que la plus petite perte de rendement observée couvre à elle seule le coût de la semence certifiée (1.6 q/ha * 35 €/q = 56 €/ha).
Des disjonctions de caractères sont quelques fois observées sur le terrain. Dans tous les cas, les caractéristiques variétales telles que le comportement à l’égard du phoma, du virus de la jaunisse du navet (TuYV) ou bien encore la richesse en huile ou en glucosinolates ne peuvent pas être garanties.
Rappelons également que les graines de ferme n’assurent pas le standard de qualité des semences certifiées : faculté germinative, pureté spécifique sur adventices et maladies.
Semis du colza : le semis direct adapté en sols bien structuré
Intérêt du semis direct :
- Limite les levées d’adventices, surtout des dicotylédones, en limitant le flux de terre et les levées de dormance
- Contribue à améliorer la stabilité structurale en surface : meilleure portance, moindre sensibilité à la battance, l’érosion et le ruissellement
- Gain de temps et de carburant
Colza associé semé au semoir de semis direct : implantation réussie (photos de gauche à droite : fin août, début septembre et début octobre) et sol protégé par le mulch pailleux (photos G Sauzet)
Conditions d’adaptation :
- Structure du sol poreuse sur 0-20cm pour garantir un bon enracinement du pivot : réaliser impérativement un test bêche dans la culture précédente pour vérifier la qualité structurale
- Absence de rongeurs dans la culture précédente et faible risque limace
- Equipement pour gérer les résidus de la culture précédente (herse à paille si besoin de répartir les résidus, chasses débris efficaces pour semer sur une ligne dégagée)
Herse à paille (à gauche) et chasse débris (à droite)
Mise en œuvre :
- Vérifier la qualité structurale dans la culture précédente : voir l’article "Evaluer la structure pour identifier le travail du sol adapté"
- Gestion des résidus du précédent :
- Si possible, récolter quand la paille est bien sèche à 20cm de hauteur environ
- En cas de mauvaise répartition des résidus : utiliser un outil type herse à paille pour les répartir
- Chasses débris efficaces souvent utiles et indispensables si les résidus sont abondants
- Semis précoce car les levées sont généralement plus lentes et à moins de 6 km/h pour limiter le flux de terre
Adapter le travail du sol au type de sol
Le choix du travail du sol est déterminant pour garantir la réussite de la levée, indispensable pour obtenir un colza robuste.
Ce choix dépend des problématiques à gérer (voir article ‘décider du travail du sol à privilégier en intégrant toutes les problématiques’) et doit être adapté au type de sol.
- Pour tous les types de sol : pas de travail superflu pour préserver l’humidité. Limiter la profondeur et le nombre d’intervention au strict nécessaire. Si le sol est travaillé, intervenir au plus tôt après la récolte, avant les pluies, si possible, et rouler. Éviter tout travail du sol dans les 15 jours avant semis pour favoriser le réhumectation en cas de pluie
Exemple d’un travail du sol post moisson permettant de bénéficier et de préserver l’humidité résiduelle
- En sols argileux (teneur > 22-25%) :
- Risques à éviter : création de mottes à cause d’un travail sur sol sec ou compacté
- Solution à privilégier : éviter le travail du sol en profondeur et notamment le labour et intervenir juste après récolte et le plus en amont du semis possible. Il est alors indispensable d’avoir anticipé pour avoir une structure du sol poreuse ne nécessitant pas de fragmentation (exemple restructurer le sol avant l’implantation de la culture précédente puis éviter les tassements)
Exemple d’une levée perturbée en sol argileux à cause la création de mottes par du travail profond
- En sols limono-sableux (sols dits ‘fragiles’) :
- Risques à éviter : battance du sol à cause d’une préparation trop fine et difficultés d’enracinement à cause de sol pris en masse.
- Solutions : fragmentation du sol souvent utile (outil à dent ou labour repris à la dent), en évitant de multiplier les passages et la création de trop de terre fine. Le strip-till est particulièrement bien adapté à ces conditions et peut être simultané avec le semis.
Parcelle de colza ennoyée à la sortie de l’hiver, à cause d’un sol battu dû à une préparation trop fine
Point technique "Réussir son implantation pour obtenir un colza robuste"
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Testez vos connaissances sur la gestion des adventices en colza et le semis direct !
Tous les vrais/faux sur la gestion des adventices en colza et semis direct :
Question 3 : Il est conseillé de semer lentement (moins de 6 km/h) pour gérer les adventices.
Question 4 : Pour la gestion des graminées, le semis direct est intéressant tant en interculture courte qu'en interculture longue.
Question 5 : Pour réussir son semis direct, il n'est pas nécessaire d'avoir un sol bien structuré.
Question 6 : Pour réussir son semis direct, un semoir à disques équipé de chasse-débris est indispensable.
Question 7 : Le semis direct est un élément indispensable à la technique du colza associé dans ces situations très infestées.
Question 8 : En semis direct, il faut semer tard.
Question 10 : Le semis direct est à éviter dans les situations à problèmes de limaces ou rongeurs.
Semis du colza : Les atouts du semoir monograine
Des levées plus rapides et régulières avec un semoir monograine
Comparaison de semoirs en conditions sèches : les colzas semés au semoir monograine sont au stade cotylédons – 1ère feuille lorsque les colzas semés au semoir à céréales sont en cours de levée. Le peuplement est plus régulier avec le semoir monograine.
(Essai Terres Inovia - Morville sur Seille (54) - automne 2012)
- Régularité de la position de la graine en profondeur et bon rappui de la ligne de semis : levée plus rapide et homogène
- Contrôle de l'espacement des graines sur la ligne : optimisation des capacités de compensation du colza
- Écartement entre rangs qui permet le binage
- Économie de semences.
Conditions de mise en œuvre :
- Ne pas dépasser 50cm d’écartement en sols superficiels
- En sols moyen à profond, les écartements de 45-50cm (semoirs à betterave ou tournesol) sont optimums
- Les écartements type maïs (jusqu’à 80cm) sont à réserver aux sols profonds à bonne disponibilité en eau et en azote
- Dans tous les cas : adapter les densités de semis pour contrôler le nombre de plantes sur le rang (ne pas dépasser 15 plantes par mètre linéaire)
Profondeur de semis : semer idéalement entre 2 et 4 cm de profondeur
Avant de prendre une décision concernant la profondeur de semis, il est nécessaire de connaitre la profondeur de la zone fraiche.
En condition optimale de fraicheur, semer à 2 cm.
En sol sec sur 3-4 cm, semer plus profondément, jusqu’à 4 cm, pour positionner la graine sur la zone fraîche. La graine germera dès que la situation climatique le permettra (1 mm de pluie par centimètre de sol) et la jeune racine pourra croître dans une zone restée fraîche.
En sol sec, sur 5 cm et plus, semer à 2 cm de profondeur pour profiter d'une germination rapide en cas de pluie. Si les précipitations sont trop faibles (inférieures à 10 mm), le risque de dessèchement du grain en cours de germination est possible, la jeune racine ayant des difficultés à se développer dans une zone sèche. C’est la situation la plus délicate. Un semis à 5 centimètres peut favoriser la levée qui sera toutefois retardée par rapport à un semis plus superficiel si la réhumectation est rapide.
Dans tous les cas, ne pas assécher inutilement le sol par des passages répétées (herse, vibroculteur). Rappuyer le sol limite l'évaporation et favorise les remontées capillaires. En conditions difficiles, le semoir de précision est un plus pour la maîtrise de la densité, de la régularité du positionnement de la graine dans le lit de semences et donc pour l'implantation du peuplement.
Point technique
Réussir son implantation pour obtenir un colza robuste
Ce guide détaille les connaissances, stratégies et règles de décision qui permettent d’adapter les techniques culturales à chaque situation, afin de réussir l’implantation, et d’obtenir un colza robuste.
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Colza
Ouvrage de référence
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Densité de semis : éviter les surdensités
Le peuplement optimal à viser en fin de levée se situe entre 20 et 35 plantes par mètre carré, selon le type de sol et l’écartement en rangs.
La densité de semis pour atteindre ce peuplement optimal se raisonne en fonction des pertes attendues à la levée qui dépendent du type de sol et du mode de semis (moins de pertes avec un semoir mono-graine, en sol léger et frais, plus de pertes en semis direct, en sol lourd, caillouteux et sec).
| Type de semoir (écartement) | Doses de semis conseillées (graines/m² ou kg/ha) en situation de pertes à la levée | |||||
| Faibles (≈15 % : semoir monograine, sols légers, frais affinés) | Moyennes ≈30 % : sols argileux, motteux, caillouteux) | Fortes ≈40 % : semis direct dans mulch et sols caillouteux) | ||||
| gr/m² | kg/ha* | gr/m² | kg/ha* | gr/m² | kg/ha* | |
| Céréales 15-34 cm | 40 | 1,6 à 2,0 | 50 | 2,0 à 2,5 | 55 | 2,2 à 2,8 |
| Monograine 35-44 cm | 35 | 1,4 à 1,7 | 45 | 1,8 à 2,2 | 50 | 2,0 à 2,5 |
| Monograine 45-50 cm | 30 | 1,2 à 1,5 | 40 | 1,6 à 2,0 | 45 | 1,8 à 2,2 |
| Monograine 60 cm | 30 | 1,2 à 1,5 | 40 | 1,6 à 2,0 | Non recommandé | |
| Monograine 70-80 cm | 22 | 0,9 à 1,1 | 25 | 1,0 à 1,25 | Non recommandé | |
* à titre indicatif, dose de semis en kg-ha pour un PMG de 4 à 5 g
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