La défoliation des colzas par broyage est-il un moyen de lutte alternatif efficace pour réduire les dégâts de larves d’altise ?
La défoliation des colzas d’hiver pour limiter les infestations et dégâts de larves d’altise est une stratégie de lutte alternative étudiée dans les pays anglosaxons, notamment au nord du Royaume-Uni où de très fortes pressions larvaires sont incontrôlables ces dernières années.
La réduction du nombre de larves par plante en éliminant les feuilles qui les hébergent est le but recherché. Mais ce n’est pas un critère suffisant pour juger de la pertinence de cette technique. En s’inspirant des travaux engagés par AHDB*, Terres Inovia a mis en place des essais en 2021 et 2022 pour évaluer cette pratique sous un climat océanique altéré et semi-continental.
Photo : Témoin non broyé et colza broyé le 23 novembre sur le site de Clémery (54). Photo du 15/12/2021, A.Baillet
Le broyage réduit le nombre de larve mais sensibilise le colza
La défoliation réduit significativement le nombre de larves par plante, comme le confirment toutes les études conduites sur le sujet. Le taux de réduction varie selon la date d’intervention et la dynamique de l’infestation larvaire. Il est de l’ordre de -30 à-50% en Grand Est en 2022 (défoliation réalisée entre mi-novembre et mi-décembre).
Toutefois dans nos essais, la réduction du nombre de larves ne se traduit pas par une baisse des dégâts d’insectes sur plante, ni par un gain de rendement comme en témoignent les essais de Rosny-sur-Seine et Mondreville (78) en 2021 ou bien encore de Clémery (54) en 2022 (tableau 1). La pratique est agressive pour le colza et affecte la physiologie de la culture. Les blessures sensibilisent la culture au gel si celui-ci survient peu de temps après le broyage. La biomasse est fortement réduite. La montaison et l’entrée en floraison sont retardées pour toutes les cultures défoliées.
En situation de faible infestation, lorsque le colza est doté d’une forte biomasse entrée hiver (> 1.5 kg/m²), et lorsque les conditions hivernales et printanières sont favorables à la récupération de la surface foliaire, la pratique est neutre sur la production. Sur les sites de Clémery (54) et Mondreville (78), l’écart de rendement n’est pas significatif entre le colza défolié en entrée hiver et le témoin. En revanche, lorsque surviennent des aléas climatiques (gel en hiver et/ou au printemps, excès d’eau), ou lorsque le broyage est réalisé plus tard (début janvier dans les essais), la culture n’a pas la capacité de récupérer un niveau de biomasse suffisant au printemps. L’état général de la culture est dégradé par la défoliation et ce d’autant plus qu’elle intervient tardivement. Dans l’essai de Rosny-sur-Seine (78), le broyage occasionne des pieds buissonnants supplémentaires qui se traduisent en quintaux perdus. Une perte de rendement significative de plus de 5 q/ha est constatée entre le colza broyé début janvier et le témoin. Dans cette situation, le broyage a exacerbé conjointement la sensibilité de la culture au gel et la nuisibilité des insectes.
Tableau 1 – Impact de la défoliation par broyage sur les dégâts d’altise et le rendement du colza dans les essais conduits par Terres Inovia en 2021 et 2022
Une prise de risque importante et un bilan économique négatif
Au regard de ces expériences, nous retenons que le broyage du colza en hiver permet bien de réduire le nombre de larves de grosses altises par pied. Mais le bénéfice pour la productivité de la culture n’est pas démontré. Voire la pratique peut s’avérer risquée si des aléas climatiques, par définitions imprévisibles, surviennent après le broyage. La réduction de la biomasse du colza fragilise la culture et ralentit sa reprise de végétation, ce qui tend à accroitre la nuisibilité potentielle des larves si les conditions pédoclimatiques ne sont pas favorables au printemps. Il faut également ajouter le surcoût de cette pratique qui est de l’ordre de 50 € dans un contexte de prix raisonnables de l’azote et du fioul (références 2020 ; tableau 2). Pour ces raisons, Terres Inovia déconseille le broyage hivernal pour lutter contre les larves d’altise d’hiver dans les régions sous climat semi-continental. Dans des contextes sous influence océanique (littoral de la Manche, océan Atlantique) amenant des conditions poussantes pour le colza pendant l’hiver, la pratique gagne sans doute à être investiguée davantage. D’autant plus si les parcelles reçoivent des effluents organiques régulièrement.
Tableau 2 – Estimation du coût de la pratique
Exemple de la parcelle de Clémery (54) en 2022. La dose d’azote conseillée au printemps est plus élevée pour le colza broyé car elle prend en compte la plus faible biomasse en sortie d’hiver (www.regletteazotecolza.fr). Evaluation économique réalisée en partenariat avec les GEDA de la Marne.
Autre approche de la technique du broyage avec des colzas associésLa technique de broyage des colzas à l’automne a également été testée par le service R&D Alliance BFC dans le cadre de l’animation du Club Agro Ecos. Les travaux ont porté sur les colzas associés avec de la féverole avec une idée : ramener la biomasse aérienne au sol pour que les éléments minéraux (NPK) qu’elle contient soient plus rapidement remis en circulation et qu’ils profitent au colza dès la reprise au printemps. L’hypothèse testée semble d’autant plus pertinente a priori pour la féverole car la plante conserve un port dressé et est donc peu accessible aux micro-organismes du sol pour assurer sa décomposition. Les observations et mesures enregistrées sur 5 parcelles de 2018 à 2022 n’ont pas permis de démontrer la plus plus-value d’une telle technique sur la dynamique de restitution des éléments NPK. Pour cela, des travaux complémentaires sont à conduire. Aucun gain de rendement n’a été enregistré. Le broyage à l’automne (ici entre mi-octobre et fin novembre) a un effet neutre sur le rendement dans 4 situations sur 5 et un effet dépressif dans une situation (-5 q/ha en 2021). |
* Agriculture and Hoticulture Development Board
«Ces essais ont été réalisés dans le cadre de Cap Protéines
Identifier la présence de larves de charançons de la tige et de méligèthes
Biologie
Les larves de charançon de la tige du colza et du chou ne présentent pas de pattes. La larve de charançon de la tige du colza est d’abord blanche à tête noirâtre et devient progressivement jaune à tête jaunâtre. Celle du charançon de la tige du chou est blanche avec une tête de couleur jaune clair. La différenciation des larves de ces deux espèces se fait cependant principalement par leur taille. Les larves de charançon de la tige du colza sont en effet beaucoup plus grosses que celles de charançon de la tige du chou lorsqu’elles sont à un stade de développement identique. En fin de vie larvaire, la larve de charançon de la tige du colza mesure 7-8 mm tandis que celle du charançon de la tige du chou mesure 4-6 mm. Les différences entre les larves de ces deux charançons restent tout de même minimes et sont plus faciles à mettre en évidence lorsque les deux espèces cohabitent et qu’il est possible de les comparer.
Larve de charançon de la tige du colza
Nuisible ou non ?
Les larves de ces deux espèces ne sont pas nuisibles. Lors de la floraison, on peut trouver des larves dans la partie médullaire des tiges mais les plantes peuvent supporter un grand nombre de larves. Des pertes de productions n’ont été identifiés que dans des cultures très denses (> 100 plantes/m2) où les larves ont attaqué les vaisseaux libéro-ligneux sur des tiges de très faible diamètre.
Pour rappel, la nuisibilité liée au charançon de la tige du colza est liée à la ponte qui engendre une réaction des tissus de la plante. Les tiges peuvent se renfler se déforment, voire éclater longitudinalement. Les pertes de rendement sont particulièrement aggravées en conditions sèches.
Biologie des larves de méligèthes
Larve de méligèthe en début de floraison du colza
Les larves de méligèthes sont mobiles, mesurent 4 mm maximum, disposent de 3 paires de pattes thoraciques noires et d’une tête noire. Certaines années, de nombreuses larves de méligèthes sont observées sur les siliques. Elles sont en situation difficile car elles ne disposent plus des boutons ou des fleurs pour achever leur développement. Ces infestations larvaires ne conduisent pas à des pertes d’organes fructifères significatives.
Il est possible de repérer facilement si certaines larves de méligèthes sont parasitées ! Elles présentent un point noir visible par transparence.
Petit guide pratique
des ravageurs du colza
Conçus pour être glissés dans la poche, les petits guides pratiques proposent des fiches pour reconnaître insectes et maladies des cultures et leurs dégâts.
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Charançons : identification de l'espèce au stade larvaire
Analyse d’un fragment spécifique d’ADN afin d’identifier les différentes espèces de charançons ravageurs du colza.
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