Published on 15 October 2025 | Updated on 16 December 2025

L’implantation des pois et féverole d’hiver 1er levier de maitrise de la maladie et du rendement

La phase de semis approche pour les pois et féveroles d’hiver. Afin de minimiser le risque de maladie et de maitriser au mieux le potentiel de rendement, la phase d’implantation est primordiale pour poser les bonnes bases de la réussite de ces cultures.

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Parcelle de pois avec zone hydromorphe en 2024, fortement impactée par la maladie

Choix d’une parcelle non hydromorphe avant tout

Le choix d’une parcelle non hydromorphe est le premier critère à considérer. C’est un facteur important dans le risque de dégâts de gel et de développement des maladies. Par ailleurs, rappelons l’importance du développement des nodosités, nécessitant une bonne aération du 1er horizon. Si certaines parcelles se prêtent plus à l’hydromorphie que d’autres, l’absence de rupture de porosité du sol doit être assurée par la préparation du sol en amont, afin de favoriser au maximum les conditions de ressuyage. A noter que la féverole présente une meilleure tolérance à l’hydromorphie par rapport à un pois ou un blé.​​​

​​​​​​​Choisir une culture et une variété adaptées au type de sol : 

  • Le pois d’hiver s’adapte à de nombreux contextes de sols. Il faudra néanmoins faire attention à bien choisir des variétés avec une bonne tolérance à la chlorose ferrique pour les limons froids et les sols calcaires. Cette carence, même si elle est passagère, peut affaiblir les plantes les rendant plus sensibles à d’autres problématiques telles que les maladies.  
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  • La féverole d’hiver s’adapte également à de nombreux types de sol mais se développera mal sur les sols acides (pH<5.5). Pour les sols basiques (pH<7.5) des carences en bores sont possibles, nécessitant de corriger la situation par un apport de 300g/ha avant début floraison. 

Pour rappel, les caractéristiques et résultats des variétés sont référencées sur le site www.myvar.fr  
Vous y retrouverez les synthèses variétales nationales et régionales parues récemment.

 

Le délai de retour de 5-6 ans entre 2 légumineuses de rente reste une règle importante dans l’insertion des légumineuses dans une rotation afin d’éviter la prolifération de certains bioagresseurs communs tel que l’aphanomyces. A noter que si le pois d’hiver évite en grande partie l’expression de l’aphanomyces en raison de son cycle décalé, la culture peut entretenir l’inoculum. Les parcelles à risque sont à éviter.  
(Plus d’informations sur les légumineuses sensibles ou résistantes à aphanomyces via ce lien)

L’exposition au froid (bassin Nord-Est, parcelle en altitude) n’est pas un facteur rédhibitoire mais des leviers agronomiques doivent s’opérer en conséquence, à commencer par le choix d’une variété à bonne tolérance au froid. Également, la date et la profondeur de semis devront bien s’adapter pour maitriser le risque (cf. partie semis).
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Le travail du sol, garant du risque d’hydromorphie et de maladies 

Attention à vérifier et corriger la structure du sol par un travail adapté. Le pois et la féverole, comme toutes les légumineuses, sont sensibles aux compactions, limitant leur enracinement et la mise en place des nodosités. Il est recommandé d’assurer une bonne structure sur minimum 15-20 cm, zone où s’opère l’essentiel de l’exploration des radicelles et de la mise en place des nodosités. Pour assurer l’autonomie azotée de la légumineuse, la symbiose nécessite un sol aéré pour capter l’azote de l’air présent dans ce 1er horizon du sol. En conséquence, vigilance pour les sols à risque de compaction et/ou d’anoxie tels que les sols séchants, les argiles lourdes et les limons battants et hydromorphes pouvant entraver l’alimentation des pois et féveroles. 

Également la préparation du lit de semence doit être soignée sur 8-10 cm afin de permettre d’enterrer à une bonne profondeur les graines et améliorer le contact sol-graine. Le pois d’hiver demande un lit de semence fin (agrégats <10 mm). A l’inverse la féverole peut s’accommoder d’une préparation plus grossière (agrégats de 2-3 cm). En cas de risque de battance, n’hésitez pas à laisser quelques mottes de 5-6 cm pour limiter le risque de croûte de battance.    

Dans toutes les situations de parcelle, l’écoulement de l’eau doit s’opérer sans obstacle lié à une rupture de porosité. Au-delà du risque d’hydromorphie sur le long terme, c’est avant tout la limitation des fenêtres d’interventions faute d’un bon ressuyage des parcelles qui peut entraver la conduite technique. Également, la stagnation de l’humidité sur la surface favorise le développement des maladies. En 2024, les préparations en TCS telles que les semis directs, ont souvent été moins impactés par la maladie en lien avec un meilleur ressuyage de la surface. Pour rappel, la préparation du sol doit se décider avant tout par la nécessité de correction du sol. 

Eviter la surdensité, pour limiter les maladies et le coût en semences

Le pois et la féverole d’hiver ramifiant plus que les types printemps, il est conseillé de ne pas dépasser les densités recommandées au risque de développer des couverts trop denses au printemps, favorisant les maladies telles que le colletotrichum et l’ascochytose pour le pois ou le botrytis pour la féverole. De plus, la surdensité augmente inutilement la charge en semences pour un risque de perte de rendement plus grand. 

POIS D’HIVER Sol limoneux

Sol argileux, argilo-calcaire
ou caillouteux

Sol de craie
60 à 70 graines/m² 80 à 90 graines/m² 115 graines/m²
PMG 200g 120 à 140 kg/ha 160 à 180 kg/ha  230 kg/ha
PMG 220g 132 à 154 kg/ha 176 à 198 kg/ha   253 kg/ha

 

FEVEROLE D’HIVER Sol limoneux Sol argileux, argilo-calcaire ou caillouteux
20 à 25 graines/m² 30 graines/m²
PMG 450g 90 à 113 kg/ha 135 kg/ha
PMG 500g 100 à 125 kg/ha 150 kg/ha

 

Test de germination nécessaire si utilisation de graines de ferme

Pour les producteurs utilisant leurs graines de ferme, il est important de réaliser un test de germination afin d’adapter la densité. En effet, le taux de germination des graines de ferme est souvent plus aléatoire, pouvant être bien inférieur au taux minimal de 80% de germination des lots certifiés. Également, il faut veiller à écarter les lots présentant des grains cassés, tachés ou déformés, souvent porteurs de maladies bien installées sur les graines. ​​​​​​​
(Plus d’informations sur le test de germination via ce lien).

Pour rappel, la plupart des maladies se transmettent principalement via la semence. L’utilisation de semences certifiées reste une sécurité tant sur la maitrise du taux de germination que sur le risque sanitaire apporté par la graine.

 

Date de semis et profondeur, leviers incontournables pour se prémunir du risque de gel et de maladies

Les dégâts de gel, favorisant l’installation de maladies telles que le colletotrichum ou la bactériose en pois et le botrytis en féverole, sont souvent les premiers facteurs de stress pouvant impacter le potentiel des protéagineux d’hiver. La pression sanitaire de ces dernières années trouve une origine dans l’évolution du climat, avec des hivers plus doux et des gels plus tardifs au début du printemps. Face à cette évolution du contexte, la date et la profondeur de semis doivent également évoluer pour permettre de limiter ce risque. 

2 conditions sont nécessaires pour limiter le risque de gel et de maladies :

  • Retarder les semis afin d’éviter d’avoir des plantes trop développées en sortie d’hiver. Pour rappel, la tolérance au froid est maximale à 2-3 feuilles et chute drastiquement vers 6-8 feuilles. Cette stratégie de semer tard est d’autant plus importante avec des mois d’octobre et début novembre très doux, propices à la croissance excessive des protéagineux. Privilégier les semis de mi-novembre à fin décembre. 

  • Protéger l’épicotyle, zone la plus sensible au gel. Cela évite que les bas de tiges souvent nécrosés en pois d’hiver permettent une remontée des maladies sur la tige par la suite. Semer à 5-6 cm de profondeur les pois d’hiver et 7-8 cm les féveroles d’hiver. Les graines étant vigoureuses, la levée peut s’opérer sur plus d’1 mois si nécessaire sans conséquence sur le potentiel. Favoriser les semoirs à dents afin d’enterrer convenablement les graines. 

Un sol nivelé pour faciliter la récolte et améliorer la sélectivité de la prélevée

Si les nouvelles génétiques présentent une meilleure tenue de tige qu’auparavant, le nivellement du sol reste recommandé sauf dans les sols limoneux sensibles à la battance.  

Un sol bien nivelé permet dans un premier temps de limiter les risques de phytotoxicité du désherbage en prélevée et surtout de faciliter la récolte, en particulier dans les sols caillouteux. Attention, il n’est pas recommandé de rouler en sortie d’hiver au risque de favoriser des blessures mécaniques et le risque de maladies. 

Une fertilisation P et K modérée mais nécessaire

Le pois et la féverole nécessitent une fourniture moyenne en phosphore et potasse, éléments jouant un rôle important dans le métabolisme notamment dans l’enracinement et la nodulation. Comptez 50-60 u de phosphore et 70-80 u de potasse selon la fourniture du sol.

 

Bastien Remurier - b.remurier@terresinovia.fr - Référent protéagineux zone Centre & Ouest