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Atténuation du changement climatique

Article rédigé par
  • Anne SCHNEIDER (a.schneider@terresinovia.fr)
Atténuation du changement climatique
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    Modifié le : 13 sept. 2023

    Comme les activités humaines ont une part conséquente sur le dérèglement climatique, la décarbonation des activités humaines peut permettre de temporiser le changement à venir, c’est à dire pouvoir encore vivre et produire dans 30 et 50 ans, dans le cas où l’on agit maintenant.

    Atténuer le changement climatique signifie réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES), en réduisant avant tout le volume émis et en cherchant à compenser les émissions résiduelles par des actions de séquestration de carbone sur le long terme.

    Un enjeu international à investir localement  

    Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) estime que l’on peut encore limiter le réchauffement planétaire en dessous de 2-3°C d’augmentation par rapport à la période préindustrielle si des décisions sont prises aujourd’hui. Leurs rapports ont souligné l’urgence à réagir avec des transformations radicales et immédiates de tous nos secteurs de la société. Les actions politiques, citoyennes, industrielles et techniques doivent être combinées et accélérées, tout en les faisant davantage converger pour être efficaces.   

    De façon inédite, en signant l’Accord de Paris lors de la COP211, les principaux états du monde se sont accordés à fixer des objectifs de réduction de leurs émissions de gaz à effet de serre (GES) d’ici 2050 et à maintenir le réchauffement sous la barre des 2°C d’ici à 2100.  

    Toute action locale, individuelle ou collective, participe à l’effort d’atténuation.   

    En France, plusieurs mesures ont été engagées : engagement français sur un "facteur 4" des émissions de GES d’ici 2050 issu du Grenelle de l'environnement, Plan pour la Transition Agroécologique, Stratégie Nationale Bas Carbone (SNBC) du gouvernement, programme « 4 pour 1000 »2 pour la séquestration du carbone organique dans les sols, dimension climat de la PAC, l’affichage environnemental des produits, des engagements de filières agroalimentaires (RSE, contribution à l’atténuation, etc.).  

    Aujourd’hui, les ambitions doivent se renforcer pour viser la « neutralité carbone » à l’horizon 2050, c’est-à-dire ne pas émettre plus que ce que l’on peut séquestrer, ambition de l’Union Européenne définie dans le Pacte vert européen (GreenDeal). C’est en ce sens que l’état et les acteurs publics et privés travaillent actuellement à la définition de la troisième SNBC de la France (SNBC3) avec des feuilles de route de décarbonation par secteur pour y contribuer.

    Quels sont les gaz à effet de serre liés aux activités agricoles et les processus en jeu ?  

    Le secteur agricole a une part de responsabilité dans les émissions de GES et il est en même temps une des solutions qui peuvent contribuer à atténuer ce changement climatique à la fois en limitant les émissions de ses activités mais aussi en augmentant le stockage de carbone dans les sols notamment. 

    Figure : Les principaux secteurs émetteurs de GES en France (Source CITEPA 2022).  

    Les émissions issues du secteur agricole sont composées principalement de trois gaz à effet de serre (GES) : le dioxyde de carbone (CO2), le protoxyde d’azote (N2O) et le méthane (CH4) (Figure 1). Etant donné que chaque GES a un « pouvoir réchauffant » différent, leur effet est ramené à une même unité, la quantité de « tonne équivalent CO2 » pour faciliter les agrégations et l’analyse de l’impact final sur le changement climatique. Par exemple le protoxyde d’azote est 298 fois plus puissant que le CO2 en termes d’effet de serre.  

    Le secteur agricole contribue pour 20,6% des émissions de la France, tous GES confondus (Rapport Secten 2022 du CITEPA. L’agriculture est un émetteur prépondérant pour les émissions de méthane (CH4) et de protoxyde d’azote (N2O), deux gaz à effet de serre qui ont les plus forts pouvoirs échauffants : en 2018, ce secteur représente de 68% des émissions de méthane françaises et 88,6% des émissions de protoxyde d’azote françaises. Les élevages sont les sources principales de méthane alors que les grandes cultures sont la source majeure de protoxyde d’azote en agriculture.  

    Par ailleurs les sols agricoles représentent un des plus forts potentiels de stockage de carbone en France (étude 4 pour mille de l’INRAE).

    Figure : Sources d’émissions de GES et pouvoir réchauffant (IPCC 2018)

    Au sein des différents GES liés à l’activité agricole, c’est le protoxyde d’azote (N2O) qui est le principal GES pour les productions agricoles. Et les cultures arables sont responsables de 50% des émissions anthropiques de N2O.  

    Le protoxyde d’azote est issu des processus naturels du fonctionnement du sol au cours des transformations de l’azote dans le sol sous l’action des bactéries lors de la nitrification et de la dénitrification.  Cependant les émissions anthropiques de N2O au champ résultent de l’augmentation forte de ces processus naturels notamment après l’apport de fertilisants azotés sur la parcelle, surtout en conditions de température et d’humidité favorable aux processus bactériens. La mobilisation d’engrais azotés représente la source majoritaire des émissions de N2O sur les ateliers grandes cultures. Il a été quantifié que la fertilisation représente 70-90% des GES d’un produit agricole dans le cas où il a nécessité des apports azotés.

    La production d’engrais étant très énergivore, l’enjeu sur le changement climatique est également très lié à l’enjeu « réduction de la consommation d’énergie non renouvelable ».  

     De façon plus minoritaire, les combustibles mobilisés lors de travaux agricoles (tracteurs, irrigation, etc.) participent à des émissions de CO2.  

     En quoi le secteur agricole peut être une solution de stockage de carbone ?  

     Le stockage du carbone dans les sols est lié à la dynamique des sols et aux pratiques modulant le retour de la matière organique au sol qui peut favoriser l’augmentation de la part de carbone stable dans les sols. En effet, par le processus de la photosynthèse, nécessaire à leur croissance, les plantes capturent le CO2 et le carbone devient alors constitutif de la plante. Si une partie est exportée à travers la récolte, une partie de la biomasse (racines, pailles) reste dans la parcelle. Cette biomasse va se dégrader en libérant du dioxyde de carbone (CO2) et des composés organiques qui, en se décomposant sous l’influence du climat et des conditions ambiantes du sol, vont évoluer sous des formes plus stables telles que l'humus, permettant un stockage du carbone dans les sols dans le temps. Les matières organiques d’origine résiduaire (effluents d’élevage ou résidus industriels ou urbains) utilisées comme intrants sur les cultures sont aussi des entrées potentielles de carbone avec des dynamiques spécifiques selon leur composition. L’évolution du stock de carbone organique dans les sols résulte donc de l’équilibre entre les apports de matières organiques au sol et leur minéralisation.

    Figure 2 : Paramètres pris en compte pour évaluer le stockage du carbone dans les sols (Label    bas-carbone Grandes Cultures)

     

    Pour les productions végétales, l’azote est un élément nutritif clé pour la productivité agricole et les engrais azotés constituent un élément explicatif majeur des impacts environnementaux (émissions des gaz à effet de serre, pollution des eaux et des milieux naturels, santé des agriculteurs et des citoyens). Favoriser la mobilisation de l’azote utile pour la nutrition des plantes via des processus agroécologiques (comme la fixation biologique) ou via le recyclage de l’azote déjà en jeu permettrait de limiter la nécessité de produire de l’azote industriellement : on parle de « re-boucler le cycle de l’azote », afin d’éviter les excès d’azote à l’origine des pollutions et les consommations d’énergie fossiles énormes nécessaires au processus Haber-Bosch utilisés pour faire des engrais azotés industriels.  

    Le carbone est un enjeu à la fois pour la séquestration de carbone afin de compenser les émissions résiduelles de l’agriculture, et également pour viser une augmentation de la matière organique, ingrédient clé de la fertilité des sols.

     

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    Les leviers d’atténuation de changement climatique en grandes cultures  
     

    Dans le secteur des grandes cultures, à l’occasion des travaux en lien avec le Label bas carbone, les leviers majeurs d’atténuation ont été identifiés pour les conditions françaises et sont listés ci-après :

    • Réduire la dose d’azote minérale apportée sur les cultures  
    • Améliorer l’efficacité de l’azote apporté et valorisé par la plante
    • Chauler les sols à pH acide (cas des pH-initiaux < 6.8 et dans l’objectif d’atteindre 6.8)  
    • Introduire des légumineuses dans la rotation ou des cultures/variétés à faible besoin en azote
    • Réduire la consommation de combustibles fossiles associées aux engins et à l’irrigation (fioul, GNR, gaz)  
    • Réduire la consommation de combustibles fossiles associées au séchage et au stockage (à ferme ou chez OS)
    • Augmenter la quantité de biomasse restituée par les couverts végétaux  
    • Augmentation des restitutions par les résidus de cultures  
    • Augmentation des apports de matières amendantes ou fertilisantes d’origine résiduaire
    • Insertion et allongement des prairies temporaires et artificielles dans les rotations.

     A privilégier : les cultures fixatrices d’azote ou à fort retour de biomasse au sol

    Les systèmes de production incluant des cultures économes en intrants azotés (légumineuses et tournesol) ou rapportant beaucoup de matières organiques au sol (couverts ou colza) sont bien placés pour participer à l’atténuation du changement climatique.  

    Terres Inovia s’est engagé fortement sur la question de l’atténuation du changement. L’institut est, en effet, membre du Club Climat Agriculture et du Comité de rédaction de la méthode sectorielle Grandes cultures. Il accompagne également toute personne intéressée par des projets qui peuvent apporter une rémunération supplémentaire aux agriculteurs s’engageant dans des systèmes et pratiques agricoles réduisant les émissions de gaz à effet de serre.

    Ainsi, Terres Inovia s’engage pour accompagner la transition écologique avec les acteurs volontaires pour viser :

    • des réductions effectives et certaines d’émissions de GES avec les légumineuses à graines (soja, pois, féverole, lupin, lentille et pois chiche) d’abord par évitement d’émissions de GES liées à l’absence d’apports d’engrais azotés sur les cultures de légumineuses à graines et ensuite par réduction sous les cultures qui les suivent dans la rotation culturale. Il y a, en effet, moins d’émissions de N2O et de CO2 au champ et en amont que dans le cas des systèmes sans légumineuses à graines. Des études antérieures avaient estimé qu’inclure une légumineuse à graines dans un système de culture peu diversifié permet une réduction de 8 à 25% de GES.
    • la séquestration de carbone permise par la présence de colza ou encore l’ajout de couverts végétaux au sein des agrosystèmes : le colza favorise le retour de la biomasse au sol via ses résidus de culture et peut donc participer au maintien ou au stockage de carbone dans les sols sur le long terme, d’autant plus s’il est associé à des légumineuses gélives.

    Comment accélérer la transition vers un réduction des émissions de GES ?

    Face à l’urgence d’agir pour atténuer ce dérèglement climatique lié au GES, des mécanismes d’incitation ont été mises en place pour des actions collectives ou individuelles. Il existe d’une part des objectifs réfléchis à l’échelle des Etats. Dans le cas de la France, la feuille de route pour lutter contre le changement climatique s’appelle la Stratégie Nationale Bas Carbone de la France (SNBC), dont l’ambition est en cours de révision à la hausse afin de viser la neutralité carbone à l’horizon 2050 comme définie par l’Union Européenne : « ne pas émettre plus de GES que ce que l’on peut compenser par de la séquestration ». Ainsi chaque secteur d’activité a un objectif de réduction de ses émissions de GES par rapport à 2015 : il est de +46% pour l’agriculture.   

    En parallèle, ont été développés des mécanismes d’attribution d’une plus-value économique pour un acteur pro-actif qui apporte volontairement sa contribution à l’atténuation du changement climatique. Pour faciliter l’accès du monde agricole au marché volontaire du carbone qui permet de vendre des crédits carbone (équivalent à des tonnes de CO2 évitées), la France porte le Label bas carbone (voir lien ci-dessous) : ce cadre méthodologique clarifie la façon de comptabiliser des Réductions d’Emissions de GES qu’un projet territorial vend de gré à gré.  

    Terres Inovia participe à la définition des méthodologies utilisables dans un projet agricole qui met en place de pratiques vertueuses qui sont sources de réduction d’émissions de GES. L’Institut poursuit également des études de quantification des réductions d’émissions qu’un agriculteur peut permettre selon les leviers considérés. Avec ses partenaires, les quantifications des crédits carbone sont estimés selon les contextes pour des projets utilisant la méthode Label bas carbone Grandes cultures. Par ailleurs, les instituts techniques agricoles français dont Terres Inovia sont impliqués dans des actions de recherche à l’échelle régionale, nationale ou européenne pour l’accompagnement à la transition intégrant la dimension carbone. Par exemple Terres Inovia est partenaire de projets européens d’envergure, dont ClieNFarms, lauréat d’un appel à proposition du GreenDeal, qui a démarré en 2022 pour 4 ans sous la coordination de l’INRAE.

    En savoir plus sur les enjeux d’atténuation:  

    Le Label bas carbone, qu’est-ce que c’est ?

    Webinaire : Quel rôle des oléagineux et des légumineuses face à l’enjeu carbone – septembre 2022 :

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    ClieNFarms : vers la neutralité carbone avec les exploitations agricoles

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