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Colloque Cap Protéines : quelles innovations couplées animales et végétales ?

05 juin 2023

Lors du colloque Cap Protéines, qui s’est tenu le 31 mai 2023, une table-ronde baptisée "Innovation couplée animal végétal​ pour améliorer la souveraineté​ et l’autonomie​" a permis de faire état des travaux pour augmenter l’autonomie alimentaire des élevages par des procédés innovants permettant de produire des tourteaux de meilleure qualité.

Isabelle de la Borde, chargée de mission alimentation
​​​​​​​et filières animales Terres Inovia - Terres Univia

Dans les élevages, la dépendance aux tourteaux de soja d’importation est forte. « Les animaux consomment 3,8 millions de tourteaux de soja par an et nous en importons 3,5 millions », constate Silvère Gélineau, ingénieur en agronomie et productions fourragères d’Arvalis. Pour rendre les élevages plus autonomes, Cap Protéines a travaillé à accroître la production de tourteaux à l’échelle de la ferme : un vaste réseau a été mis en place, avec des essais zootechniques pour étudier la valorisation de certains pâturages ainsi que des plateformes d’essais fourragères sur l’amélioration de la production. « Des innovations ont aussi été testées pour substituer aux tourteaux d’importation des matières premières riches en protéines, comme des graines crues ou toastées de colza, lin et tournesol. »

Trois leviers pour augmenter l’efficience nutritionnelle des tourteaux

Comment améliorer la qualité des tourteaux produits en France ? Isabelle de la Borde, chargée de mission alimentation et filières animales de Terres Inovia, a introduit la première table-ronde du colloque Cap Protéines en présentant travaux réalisés par l’institut technique pour augmenter l’efficience nutritionnelle de ces tourteaux, avec trois objectifs : « Préserver la digestibilité des protéines pour les monogastriques, obtenir des matières premières riches en protéines plus concentrées et mieux presser les graines décortiquées. »

Trois leviers ont donc été étudiés dans le cadre de Cap Protéines :

  • Le décorticage : les travaux sur le décorticage ont permis d’obtenir des tourteaux de colza et de tournesol expérimentaux à haut niveau de décorticage (respectivement 55% et 90%), puis testés sur porcs et volailles. Leur valeur nutritionnelle a aussi été évaluée. « Il faut continuer à travailler sur l’aptitude au décorticage des graines et à la valorisation des coques. »
  • La cuisson : pour étudier l’impact des traitements thermiques sur la qualité des tourteaux de colza et de tournesol, Terres Inovia a investi dans deux cuiseurs expérimentaux. « L’objectif est maintenant d’améliorer nos connaissances dans les traitements thermiques afin d’obtenir la juste cuisson qui permet à la fois la destruction des facteurs antinutritionnels et la préservation de la digestibilité de la protéine. »
  • La pression : une thèse sur la modélisation du pressage des graines décortiquées a été lancée, une presse instrumentée et une micro-presse ont ainsi été acquis. « Il faut maintenant poursuivre les travaux sur l’extraction mécanique afin de proposer des solutions pour les industriels », conclut Isabelle de La Borde.

Utiliser davantage de légumineuses fourragères pour les tourteaux

Première table-ronde du colloque Cap Protéines en présence de Jean-Louis Peyrant (Inrae),
​​​​​​​Cédric Pasco (Saipol/Avril) et Thomas Aubry (Nutralp).

Ces innovations permettront-elles, un jour, de se passer des tourteaux d’importation ? Pour Jean-Louis Peyraud, directeur scientifique adjoint Inrae, « c’est difficile de les remplacer complétement, mais on peut réduire leur consommation, en utilisant davantage de légumineuses fourragères, de luzerne et, bien-sûr, de tourteaux de colza et de tournesol. Les protéagineux aussi peuvent produire des tourteaux, mais, avec leurs rendements plus faibles, les surfaces baissent. Ce sont des secteurs à rebooster ». Et du côté des élevages, ce spécialiste de l’alimentation animale confirme que « certaines filières animales consomment de moins en moins de tourteaux de soja, comme les porcs par exemple. Ce n’est pas le cas en revanche pour les filières lait et volailles ».

Jean-Louis Peyraud, directeur scientifique adjoint Inrae

Des tourteaux de colza à valoriser davantage

Augmenter la production de soja en France serait-il également un autre levier pour réduire notre dépendance aux importations ? « Oui, c’est possible, même s’il y a des conditions pédoclimatiques à respecter pour faire pousser le soja, donc ça ne suffira pas. On constate néanmoins que des éleveurs font évoluer leurs pratiques en substituant avec du colza et du tournesol pour nourrir leurs élevages », explique Cédric Pasco, responsable desk protéines de Saipol, spécialiste de la première transformation des graines. Produire des tourteaux de colza a ainsi permis de réduire les importations de tourteaux de soja et de tournesol. « Nous avons investi dans des procédés de décorticage pour produire des tourteaux de tournesol High Pro. Pour limiter le recours au soja d’importation, l’un des leviers est d’augmenter les surfaces, mais aussi d’augmenter la teneur en protéines de nos graines de colza et de tournesol ». Cette filiale d’Avril a notamment un projet, Décoproze, avec un semencier pour « arriver, en 2028, à produire des graines de tournesol ayant la même teneur en huile et un taux en protéines augmenté ».

Cédric Pasco, responsable desk protéines de Saipol,
spécialiste de la première transformation des graines

Des tourteaux produits localement

Sur le terrain, des initiatives existent pour produire plus de tourteaux locaux. Thomas Aubry, directeur de la coopérative Bresse-Mâconnais, a initié le projet Nutralp, une usine de trituration en colza et tournesol qui réunit trois coopératives de l’Ain et de la Haute-Savoie. « Comme nous cultivons ces graines, on peut les travailler nous -mêmes. Cette usine devrait être opérationnelle courant 2024. » Avec, aussi, des difficultés à solutionner. « Il faut trouver des graines en quantité suffisante, ce qui implique une hausse des surfaces. Mais les réglementations peuvent être un obstacle au développement des cultures. »

Thomas Aubry, directeur de la coopérative Bresse-Mâconnais,
et initiateur du projet Nutralp

Ces solutions pourront-elles de diminuer réellement notre niveau d’importation de tourteaux de soja ? « Plus vite on réussira à rattraper la qualité des tourteaux de soja d’importation, plus vite nous pourrons le substituer. Il faut aussi travailler le volet des itinéraires techniques et de la génétique de la plante pour améliorer la production » recommande Jean-Louis Peyraud.
Prochaine étape après Cap Protéines ? « Il faut maintenant réfléchir à des simulations avec des approches territorialisées pour savoir sur quel niveau de surfaces à l’avenir nous pouvons compter ; or, aujourd’hui c’est encore flou ».


Revoir la première table-ronde :
Innovation couplée animal végétal​ pour améliorer la souveraineté​ et l’autonomie​

Et toujours plus d'informations ici. ​​​

Contact Terres Inovia : i.delaborde@terresinnovia.fr

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