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Effet de l’introduction de couverts d'interculture sur les adventices : analyse d'un réseau d'essais (projet Vancouver)

15 juin 2020

Le projet Vancouver touche à sa fin. Ci-dessous vous trouverez les résultats obtenus par Terres Inovia et ses partenaires. Ces résultats ont été présentés lors du COLUMA de décembre dernier,  Gestion des adventices : les travaux de l’institut présentés au COLUMA. Pour terminer le projet, un séminaire aura lieu le 17 novembre prochain à Toulouse (MAJ : suite à la situation sanitaire actuelle, le séminaire est repoussé à une date ultérieure).

L’implantation de couverts d’interculture ou de couverts associés maintenus ensuite dans l’interculture et la culture qui suivent est une pratique de plus en plus répandue. On peut cependant s’interroger quant à son intérêt pour limiter le salissement des parcelles, notamment par rapport à un travail du sol superficiel répété dans l’interculture. Pour répondre à ces questions, des essais ont été mis en place dans le cadre du projet CASDAR VANCOUVER par plusieurs partenaires (Terres Inovia, Agrosolutions avec les coopératives Océalia et Vivadour et la Chambre d’Agriculture d’Indre-et-Loire avec l’EPL de Tours-Fondettes) dans différents contextes pédoclimatiques, soit en interculture longue (blé-tournesol ou blé-maïs), soit en interculture courte (colza-blé). Ce réseau d’essais, piloté par Terres Inovia, s’est appuyé sur un protocole commun par type d’essai testant ou combinant type / gestion du couvert et déchaumages / faux-semis.

Des mesures de la biomasse du couvert végétal et des comptages de la flore adventice dans l’interculture et dans la culture suivante ont permis de mettre en évidence que plus le couvert est étouffant (forte biomasse) moins les adventices présentes à la même période, que ce soit en interculture ou dans la culture associée, sont denses et développées. Ce résultat n’est cependant pas vérifié dans la culture suivante.

partenaires projet vancouver

Les différents partenaires du CASDAR VANCOUVER ont mis en place un ou des essais de type blé-tournesol ou colza-blé, dans différents contexte pédo-climatiques (voir tableau) permettant ainsi d’avoir un réseau d’essais.

  Terres Inovia Lycée Tours-Fondettes - CA37 Vivadour Océalia Nombre d'essais
Interculture longue : blé-tournesol ou blé-maïs 1 en Charente Maritime "Surgères" 1 en Indre-et-Loire blé-maïs "Fondettes" 1 dans le Gers "Vivadour" 1 dans les Deux-Sèvres "Varenne" 4
Interculture courte : colza-blé 1 dans l'Indre "Levroux" 1 en Indre-et-Loire "Fondettes" 0 2 dans la Vienne  "Brunet" et "Gaborieau" 4

Les objectifs de ces essais étaient d’évaluer l’effet du couvert sur la levée et le développement des adventices et d’évaluer les modes de conduite de l’interculture (couvert étouffant ou non, implanté en association avec la culture précédente (colza) ou non, destruction précoce ou tardive du couvert, faux-semis après ou non…) sur la gestion des adventices.

Ces essais ont été conduits en dispositif de type carré latin, avec 3 répétitions randomisées des modalités A, B et C.

Les notations réalisées concernaient la densité des adventices (méthode Barralis), les biomasses des adventices et des couverts, la note de satisfaction du désherbage et le peuplement de la culture suivante et son infestation.

Mesure de biomasse

Mesure de biomasse

Interculture longue : Essais blé-tournesol (ou blé-maïs)

Dans ce type d’essai, trois modalités A, B et C sont comparées, mettant en œuvre différentes conduites de l’interculture longue : mise en place d’un couvert étouffant et maintien le plus longtemps possible jusqu’à la préparation du lit de semences du tournesol (A) ; mise en place d’un couvert étouffant et destruction en entrée hiver puis faux-semis avant implantation du tournesol (B) ; mise en place d’un couvert minimal, réglementaire (moins dense et moins diversifié) puis labour en entrée hiver et préparation classique du semis du tournesol (C).Mod

Modalité Eté-automne après blé Entrée hiver Sortie hiver Préparation tournesol Tournesol puis blé
A

Couvert interculture étouffant

Avoine + trèfle d'Alexandrie + phacélie + Dents Michel dans couvert (préparation w sol profond)

  destruction vibroculteur Pas de prélevée (T tolérant)
B destruction   1 à 2 Faux-semis au vibroculteur
C Couvert règlementaire (avoine/vesce ou moutarde) ou pas de couvert labour   vibroculteur

Résultats

Sur trois essais sur quatre, dans l’interculture longue type blé-tournesol ou blé-maïs, les modalités avec un couvert choisi pour être étouffant (modalités A et B) étaient moins infestées par les adventices en entrée hiver que la modalité sans couvert ou avec un couvert minimal règlementaire (modalité C).

Densité d’adventices au cours du temps pour les essais de Fondettes et de Surgères :

Densité d’adventices au cours du temps pour les essais de Fondettes et de Surgères

En effet, la modalité C à Fondettes est plus infestée en adventices à l’automne que les modalités A et B ; ensuite, au printemps, le labour sur la modalité C a tout enfoui. A Surgères, on voit également qu’avant la destruction totale des couverts (en sortie hiver sur cet essai, car empêchée à l’entrée de l’hiver à cause d’une pluviométrie élevée à l’automne), les modalités avec un couvert étouffant (A et B) sont plus propres que la modalité C. C’est le même constat sur l’essai de Vivadour en entrée hiver, d’autant que la modalité C n’avait pas de couvert sur cet essai. Cela confirme l’importance de la biomasse du couvert vis-à-vis des adventices en interculture.

Biomasses du couvert et des adventices en entrée hiver (15/11/2017) pour l’essai Vivadour :

Biomasses du couvert et des adventices en entrée hiver

Cependant, l’effet n’est pas visible ensuite dans la culture de printemps suivante. Notons toutefois que le labour sur la modalité C assure un sol propre avant le semis de la culture de printemps.

  • Donc le couvert étouffant est moins infesté en entrée hiver que le couvert minimal règlementaire.
  • Et cet effet n’est pas visible dans la culture suivante.

Pour tenter de confirmer ces tendances par les statistiques, les données des 4 essais d’interculture longue ont été compilées. Malgré les limites (peu de données), il en ressort que la modalité (c’est-à-dire le type de couverture du sol durant l’interculture et le type de travail du sol) est explicative de la densité d’adventices à l’entrée de l’hiver de l’interculture (soit en novembre-décembre entre blé et tournesol). La présence d’adventices est plus importante pour la modalité C (couvert minimal) que pour les modalités A et B (couvert étouffant) pour chaque site. Une tendance similaire peut être observée en sortie d’hiver mais les données sont incomplètes et de ce fait la quantité de données restant disponible est faible pour réaliser des tests de significativité.

Dans les modalités C des différents essais, où le couvert est léger voire inexistant (en bleu sur la figure), la quantité d’adventices est plus forte que dans les autres modalités (en rouge et vert), où un couvert étouffant était réalisé. Plus la biomasse du couvert est importante, plus la biomasse des adventices est faible.

Relation entre la biomasse aérienne du couvert et la biomasse aérienne en adventices pour les différentes modalités de couvert :

A : couvert étouffant détruit en sortie hiver

B : Couvert étouffant détruit en théorie en entrée hiver

C : pratique régionale : couvert minimal puis labour en entrée hiver

Il est donc possible d’avancer que le couvert d’interculture réduit la quantité d’adventices en interculture et que l’état de salissement d’une parcelle dépend de son historique d’infestation (c’est-à-dire de la densité à la période de comptage précédente).

Cependant, il n’y a pas d’effet du couvert sur les adventices observées dans la culture suivante.

Interculture courte : Essais colza-blé

Dans ce type d’essai, trois modalités A, B et C sont comparées, mettant en œuvre différentes conduites de l’interculture courte après le colza : maintien d’un couvert pérenne de type trèfle blanc implanté au moment du semis du colza durant l’interculture puis destruction mécanique avant le semis du blé (A) ; maintien du couvert pérenne implanté au semis du colza, durant l’interculture et semis du blé dans ce couvert après régulation chimique (B) ; conduite classique d’interculture recouvert par des repousses spontanées de colza (colza non associé) puis destruction et faux-semis avant implantation du blé (C).

Modalité Colza Eté avant blé Automne avant blé Blé
A Associé (lentille, trèfle d'Alexandrie, féverole, trèfle blanc) Couvert maitenu Destruction mécanique Semis combiné
B Régulation chimique SD dans couvert
C seul W sol superficiel Repousses CO puis destruction 1 faux-semis Semis combiné

Couvert associé : mélange d’espèces annuelles gélives pour couvrir rapidement le sol dans le colza (lentille, trèfle d’Alexandrie, féverole) et d’espèces pérennes pour maintenir le couvert en interculture (trèfle blanc).

Résultats

Densité d’adventices au cours du temps de l’essai de Fondettes :

Sur l’essai de Fondettes à l’entrée de l’hiver, le colza seul (modalité C) est plus infesté par les adventices que le colza associé des modalités A et B (mélange d’espèces annuelles gélives + trèfle blanc). En effet, le désherbage a pu être réduit dans le colza associé par rapport au colza seul, sous réserve d’une implantation correcte du colza et du couvert (semis précoce, conditions météo…).

Relation entre la biomasse aérienne du colza associé au couvert de légumineuses et la biomasse des adventices à l’entrée de l’hiver (22/11/2017) pour l’essai Levroux :

Plus la biomasse aérienne de colza + couvert est importante et moins la biomasse aérienne adventice est importante. Cela illustre donc l’effet répressif sur les adventices d’une biomasse importante, renforcée par la biomasse du couvert dans la culture par rapport à un colza seul, moins couvrant.

  • Donc en entrée hiver le colza seul est plus infesté que le colza associé (désherbage réduit sous réserve d’une bonne implantation).
  • Et plus la biomasse aérienne de colza + couvert est importante et moins la biomasse aérienne adventice est importante.

Ensuite, dans l’interculture courte type colza-blé, la difficulté d’implanter un couvert permanent qui dure (ici le trèfle blanc dans le colza, afin qu’il s’installe bien et qu’il demeure ensuite en interculture) a impacté trois expérimentations sur quatre. En cas d’implantation réussie du couvert (un seul essai, Brunet), il est apparu indispensable de le réguler dans le blé suivant.

En général, peu de différences ont été observées entre les modalités à l’interculture estivale et dans le blé suivant (date du 19/11/2018).

Statistiquement sur les 4 essais d’interculture courte, l’absence de couvert (modalité C) semble augmenter la quantité d’adventices pendant l’interculture suivant le colza. Cependant, le faible nombre d’observations rend l’étude de significativité difficile. Au début du blé suivant le colza, c’est la densité d’adventices en fin de colza et en interculture qui explique le mieux la quantité d’adventices dans le blé suivant.

Conclusion

Si notre étude, confirmée par la bibliographie, permet de montrer que plus la biomasse du couvert (pendant l’interculture ou en association avec la culture) est importante et moins les adventices présentes à la même période (et pas dans la culture suivante) sont denses et développées, nous ne pouvons cependant pas montrer d’impact sur le salissement en adventices dans la culture suivante. Cet aspect doit encore être vérifié.

Par ailleurs, travailler en réseau d’essais entraine quelques inconvénients. En effet, si le réseau d’essais a l’avantage de prendre en compte les variations territoriales inter-annuelles, imposer le même itinéraire technique sur des parcelles de régions différentes soumises à des conditions climatiques différentes engendre des complications de mise en œuvre mais aussi d’interprétation.

Contact : Fanny VUILLEMIN (f.vuillemin@terresinovia.fr)

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