Tournesol : quelles sont les pratiques culturales?
Tournesol : quelles sont les pratiques culturales?
Le tournesol est une culture qui multiplie les atouts. L’enquête de Terres Inovia sur les pratiques culturales sur le tournesol en 2019, sur la base de données collectées sur 542 parcelles, en témoigne.
Le tournesol : une culture agro écologique
Des couverts végétaux en interculture de plus en plus présents
En 2019, environ un tiers de la sole tournesol était précédé d’un couvert végétal en interculture, proportion d’ailleurs en hausse au cours des quinze dernières années. Les mélanges à base de graminées et de légumineuses, de crucifères (moutarde blanche) ainsi que de légumineuses et phacélie arrivent en tête des familles les plus cultivées en interculture. En toute logique, la pratique des couverts diffère selon les régions pour des raisons climatiques et de type de sols, impactant la facilité de réussite des couverts et leur intérêt à l’échelle de la rotation.
Une tendance à des rotations plus longues dans les grands bassins
Dans les principaux bassins de production de tournesol en France (sud-ouest et Poitou-Charentes), les rotations ont eu tendance à s’allonger au cours des dernières années, avec notamment l’introduction de cultures comme le soja ou le maïs en sec, en particulier dans les sols profonds. C’est le cas des bassins comme le Centre Val de Loire, la Bourgogne mais aussi la Lorraine et la Champagne-Ardennes.
Dans le même temps, le tournesol s’est en partie déplacé vers les sols intermédiaires et superficiels, à potentiel de rendement moindre, en particulier dans le bassin sud-ouest.
Il apparaît ainsi que les rotations avec un tournesol tous les trois ans ou plus sont un atout pour une culture performante. Le risque parasitaire y est globalement moindre notamment avec des maladies comme le mildiou. Insérer le tournesol dans des rotations diversifiées, quel que soit le type de sol, constitue donc un levier pour améliorer les performances de la culture dans la durée.
Une diversité variétale croissante
Au cours des vingt dernières années, le contexte de culture du tournesol a fortement évolué :
- Le développement du débouché oléique au détriment du linoléique,
- L’extension ou l’évolution de maladies (Verticillium dahliae, Plasmopara halstedii) ou de plantes parasites (Orobanche cumana) qui sont principalement combattues par le levier génétique,
- La mise sur le marché de variétés tolérantes (Clearfield®, Clearfield Plus®, ExpressSun®) à des herbicides de postlevée, permettant un contrôle plus efficace de certaines adventices (Xanthium strumarium, Xanthium spinosum, Datura stramonium, tournesols sauvages, chardons).
Pour s’adapter à ces différents enjeux, les initiatives des sélectionneurs, des organismes de conseil et d’approvisionnement et des agriculteurs ont entraîné une diversité variétale croissante.
Une culture adaptée au désherbage mixte
Si l’herbisemis suivi du binage reste très minoritaire (5% des surfaces), le binage suivant un désherbage chimique en plein, majoritairement en prélevée, est pratiqué sur un tiers des surfaces de tournesol en France. Ce taux est stable ces dix dernières années. Les régions où il est le plus fréquemment pratiqué sont, par ordre décroissant, le Poitou-Charentes, le Centre Val-de-Loire et le sud-ouest.
Une culture très simple, à piloter plus finement
Une densité adaptée au contexte
La qualité d’implantation est un facteur clé de réussite du tournesol. Les conditions de semis (vitesse, positionnement des graines) et la densité sont des éléments clés de réussite. La densité optimale de semis est le plus souvent comprise entre 65 000 et 75 000 graines par ha. Malgré de nettes améliorations des pratiques depuis dix ans, deux écueils existent encore : les sous-densités de semis, inférieures à 65 000 graines / ha, pénalisantes pour le rendement et la teneur en huile, et, inversement, les sur-densités à écartement large (≥ 75 cm) qui augmentent le risque de verse à partir de la fin de floraison.
En outre, le risque d’apparition de larves de taupin a eu tendance à augmenter. Cela s’est traduit par un taux de protection insecticide au semis passant de 38% des surfaces en 2009 à 47% en 2019.
La densité de semis doit intégrer le risque de pertes à la levée. Or, les pratiques traduisent des points à améliorer : en 2019, 26% des surfaces ont connu des pertes à la levée, selon les agriculteurs, avec un taux supérieur à la moyenne (21% par hectare) sur les cinq dernières enquêtes (2009-2011-2013-2017 et 2019). Les conditions fraîches et sèches à la levée en avril-mai 2019 ont augmenté le risque de déprédation.
En 2019, les principales causes de manques à la levée, parmi celles citées par l’agriculteur, sont les oiseaux* avec 67% des parcelles, les lapins (16%), les limaces (11%) et les larves de taupin (8%). 14% des parcelles ont été partiellement re-semées à cause de ce manque à la levée et seulement 2% ont fait l’objet d’un re-semis de toute la parcelle. Le risque lié à la déprédation est donc à relativiser même s’il est réel.
Des impasses en phosphore et potasse élevées
Au cours des quinze dernières années, les pratiques de fertilisation du tournesol ont peu évolué en France, s’agissant des doses d’apport et des taux d’impasse. Néanmoins, nous observons une baisse tendancielle des doses d’apport en phosphore et potasse sur le tournesol et une légère augmentation en azote.
Si le taux d’impasse en azote n’est pas élevé en soi, la marge de progrès réside dans le raisonnement des apports d’azote en tournesol (d’où intérêt d’utiliser la méthode du bilan prévisionnel) et des impasses en phosphore et potasse qui sont à un niveau élevé (40% des surfaces) depuis de nombreuses années. Certes, le tournesol est moyennement exigeant en potasse et peu exigeant en phosphore. Mais les données des analyses de sol montrent une baisse marquée des teneurs en phosphore des sols au cours des vingt dernières années dans les bassins de production sans élevage ni apport de produits résiduaires organiques.
Comparaison des doses et taux d’impasse en azote, phosphore et potasse sur tournesol
Les périodes privilégiées d’apport de l’azote minéral varient fortement selon les bassins : il estmajoritaire au semis dans le nord-est et le centre-est et, au contraire, en végétation dans le sud-ouest et, dans une moindre mesure, dans le centre-ouest. L’apport de l’azote en végétation, avant le stade 14 feuilles, permet en tendance une meilleure utilisation de l’engrais azoté apporté à la plante.
Irriguer le tournesol : une réelle opportunité
Si 18% de la sole tournesol est positionnée sur des terres irrigables, seul 6% de la sole, (un tiers des surfaces irrigables) sont irrigués avec 57 mm apportés en deux tours d’eau en moyenne. Les taux d’irrigations peuvent différer fortement entre régions : ils représentent 4% des surfaces en Centre Val-de-Loire, 5% dans le sud-ouest, 6% en Poitou-Charentes et jusqu’à 9% en Rhône-Alpes. L’irrigation du tournesol est particulièrement bien valorisée dans les sols intermédiaires à superficiels, avec des gains de rendement de 8 à 14 q/ha/100 mm, en année sèche comme fut 2019.
Récolter au bon stade
Dans un contexte d’année chaude et sèche, 37% des parcelles ont été récoltées à une humidité des graines inférieures à 8%, c’est-à-dire en sur-maturité par rapport à la norme de 9%. Cela permet de s’affranchir de frais de séchage, qui peuvent devenir élevés si la valeur dépasse significativement les normes. Mais une récolte à sur-maturité augmente le risque d’égrenage et peut s’accompagner de pertes économiques pour le producteur si l’acheteur ne recalcule pas le poids de la livraison aux normes.
Une récolte avant le 30 septembre doit être recherchée en France afin de sécuriser le rendement et la qualité des graines. Le risque de récolte à humidité trop élevée augmente fortement au-delà du 1er octobre. Cette date facilite également l’implantation de la culture suivante. Cet enjeu est particulièrement important pour les bassins de production les plus océaniques et/ou septentrionaux de l’hexagone. La bonne stratégie repose sur un choix adapté de la date et densité de semis, de la précocité variétale et sur un suivi régulier de la maturité pour récolter au stade optimal (8 à 11% d’humidité des graines).
Répartition des humidités des graines à la récolte selon la période de récolte du tournesol
Une culture robuste
Le rendements moyen 2019 du tournesol via cette enquête s’établit à 24.0 q/ha (erreur-type associée à cette moyenne = +/- 0.3 q/ha). Dans ce contexte délicat, marqué par la sécheresse dans la grande majorité des bassins de production, les rendements obtenus sont logiquement en retrait par rapport à la moyenne des précédentes campagnes enquêtées. Néanmoins, il ressort que le tournesol a de nouveau montré ses atouts : sa robustesse à la sécheresse et aux fortes températures de la fin du printemps et de l’été 2019 a été remarquable, relativement par rapport à d’autres cultures d’été.
*par ordre décroissant de prépondérance dans les parcelles : pigeon ramier (palombe), pigeon biset (pigeon de ville) et corvidés (corbeaux freux essentiellement) selon les enquêtes en ligne sur les dégâts réalisées par Terres Inovia.
Contacts : Claire MARTIN MONJARET (c.monjaret@terresinovia.fr); Vincent LECOMTE (v.lecomte@terresinovia.fr)