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Récolte du chanvre textile : les producteurs dans les starting-blocks

24 juil. 2025

Les pratiques et la date de récolte du chanvre dépendent des débouchés visés, selon que l’on cherche à valoriser la paille — et en particulier le type de fibre — ou la graine. Et le textile, c'est pour la semaine prochaine !

La récolte du chanvre ne s’improvise pas : elle doit être rigoureusement adaptée au débouché visé, qu’il s’agisse de fibres ou de graines (chènevis). Chaque filière impose ses propres exigences en termes de stade de récolte, de matériel et d’organisation, conditionnant directement la qualité des produits obtenus.

La diversité des pratiques – récolte en un ou deux passages, fibres longues ou courtes, paille ou chènevis – reflète la richesse des débouchés, mais suppose une bonne coordination entre agriculteurs, industriels (le chanvre est cultivé sous contrat avec un industriel chargé de la première transformation) et équipementiers.

Débouché textile

Pour un usage textile, le chanvre est récolté à pleine ou fin de floraison, dès la libération du pollen par les fleurs mâles (90 à 100 jours après semis) et, pour une majorité des producteurs, ce sera la semaine prochaine. Une récolte trop tardive entraîne la formation de fibres secondaires, moins adaptées aux exigences du textile.

Le type de fibre visé détermine le matériel utilisé

  • Fibres longues : la récolte doit permettre de paralléliser les pailles, lesquelles ne doivent pas excéder 1 m de long pour s’adapter aux outils de transformation du lin. La machine Hyler Sativa 200A a été développée pour cela. Les pailles étant sectionnées en deux, lors du pressage les balles de têtes et de pieds doivent être séparées pour un teillage différencié. Ces fibres permettent de produire des vêtements 100 % chanvre.
  • Fibres courtes : récoltées avec une faucheuse à section (type Sauerburger), puis andainées et pressées (balles rondes ou carrées), les pailles sont ensuite acheminées vers une ligne de transformation dédiée à la production de fibres courtes. Elles sont utilisées en mélange avec du coton pour produire du fil cotonisé.

Débouché graines

La récolte pour le débouché graines aura lieu peu ou prou dans un mois, puisque celles-ci mûrissent 4 à 6 semaines après la floraison. Toutefois, cette maturité n’est pas uniforme au sein d’une même inflorescence : alors que certaines graines sont déjà tombées, d’autres, situées plus haut, peuvent encore être vertes.

Bon stade de récolte du chènevis (moins de 10% de graines vertes).
Crédit : Louis-Marie Allard, Terres Inovia.

Une récolte trop précoce donne trop de grains verts ; trop tardive, elle provoque des pertes par déhiscence. Le stade optimal de récolte peut se résumer ainsi :

  • les enveloppes des graines situées à la base de l’inflorescence commencent à se détacher ;
  • les graines situées au sommet sont encore au stade pâteux ;
  • les tiges sont presque entièrement défoliées ;
  • moins de 10 % des graines restent vertes (ce que l’on peut évaluer en battant des inflorescences à la main).

À ce stade, la paille est également mûre. Deux méthodes de récolte sont possibles.

Récolte de la graine et de la paille en un seul passage

Les chanvrières peuvent être équipées de moissonneuses-batteuses spécifiques, de type BAFA. On utilise généralement des becs Kemper d’ensileuse adaptés, et le rotor coupe la paille en segments de 50 à 60 centimètres.

L’ensemble des brins de paille passe dans le batteur et les secoueurs, ce qui permet d’assurer le battage complet de toutes les têtes, même en cas d’hétérogénéité de hauteur sur la parcelle.

Matériel de récolte équipé d’un bec Kemper type BAFA.
​​​​​​​Crédit : Louis-Marie Allard, Terres Inovia.

Récolte en deux passages : la graine puis la paille

Dans un premier temps, la graine est récoltée avec une moissonneuse-batteuse classique, à condition d’y apporter quelques adaptations simples pour éviter que les fibres de chanvre ne s’enroulent autour des éléments de la machine.

Les principales modifications à prévoir :

  • ajouter des tôles de protection sous la machine pour empêcher les fibres d’atteindre et de s’enrouler autour des organes hydrauliques et également de réduire l’usure du matériel liée à l’abrasivité des pailles ;
  • installer des diviseurs à l’avant pour limiter l’écrasement des plantes par les roues.

D’autres équipements peuvent aussi être utiles, comme un système de type col-de-cygne placé entre la barre de coupe et le convoyeur. Ce dispositif permet de relever la hauteur de coupe à plus de 2 m, afin de ne récolter que la partie haute des plantes, là où se trouvent les graines. Cela réduit considérablement l’entrée de tiges dans la machine et donc les risques d’enroulement, à l’intérieur comme à l’extérieur.

Une fois la graine récoltée, différentes étapes restent nécessaires pour récupérer et valoriser les tiges. Juste derrière la moissonneuse-batteuse, elles sont coupées au plus près du sol avec une faucheuse à section type Busatis. Elles vont alors sécher et rouir. Sous l’action des conditions climatiques (rosée, pluie, soleil) et des micro-organismes, le rouissage a pour objectif de faciliter la séparation des fibres du bois de la tige. Un à plusieurs passages de faneuses s’avèrent nécessaires pour la réussite de l’opération. Les tiges de chanvre sont alors andainées puis pressées. En attendant d’être acheminées vers les outils industriels, les balles rondes ou carrées seront obligatoirement mises à l’abri.  

Séchage rapide : une étape clé pour préserver la qualité de la graine

La graine de chanvre est souvent récoltée avec un taux d’humidité élevé, généralement entre 18 et 20 %, voire davantage. Or, pour pouvoir être stockée en toute sécurité, la graine doit être rapidement nettoyée puis séchée dans les 6 à 12 heures suivant la récolte, jusqu’à atteindre une humidité inférieure à 9 %. On évitera ainsi une dégradation de la graine pouvant compromettre sa qualité, en particulier pour un usage alimentaire.

Pour limiter ces risques dès la récolte, il est recommandé de ventiler les bennes de transport à l’aide de souffleries, gaines ou ventilateurs. Cette aération préventive empêche les graines de chauffer et assure une meilleure conservation en attendant le séchage.
 

Contact : L.-M. Allard, lm.allard@terresinovia.fr