Ne pulvériser que les taches d’adventices ? Terres Inovia l’a essayé pour vous !
Ne pulvériser que les taches d’adventices ? Terres Inovia l’a essayé pour vous !
Aujourd’hui les drones sont capables de cartographier les zones infestées par les adventices. Pour restreindre la surface traitée, et donc les quantités d’herbicides utilisées, l’idée de pulvériser uniquement ces taches méritait d’être testée et évaluée.
Depuis l’acquisition des images par drone puis leur traitement, jusqu’à l’exploitation de la carte par le pulvérisateur au champ
Au sein du projet européen H2020 « IWMPRAISE », Terres Inovia et son partenaire AgroSup Dijon ont mis en place en collaboration avec AIRINOV puis DELAIR et Berthoud, deux essais sur colza pour évaluer la pulvérisation ciblée sur les tâches d’adventices détectées préalablement par drone. En effet, la chaine de réalisation est longue et il faut vérifier que tout est réalisable et bien coordonné.
En pratique, le drone passe sur la parcelle d’un champ de colza semé à large écartement (60 cm) au stade 4 feuilles environ, les zones infestées d’adventices sont alors identifiées. La prise en compte des zones à traiter est fonction du taux d’adventices présent dans l’inter-rang. La carte de traitement qui en résulte est produite dans les quelques jours qui suivent le vol. Introduite dans la console du pulvérisateur au stade 6 feuilles du colza environ, elle va permettre de couper les tronçons de la rampe au-dessus des zones à ne pas traiter, afin d’optimiser le traitement herbicide. L’efficacité du désherbage in fine est évaluée : les taches d’adventices sont-elles bien désherbées ? les zones à ne pas traiter se salissent-elles au cours du cycle ?
Deux essais dijonnais : avec Airinov en 2018-2019, avec Delair en 2019-2020
L’objectif de ces deux essais exploratoires était de vérifier :
- la faisabilité
- l’efficacité
- l’intérêt
- la pertinence
- le gain environnemental d’une telle technique
Pour juger de la pertinence du service, les résultats obtenus par drone ont été confrontés à des relevés de flore terrain sur des placettes dédiées. L’efficacité du désherbage (satisfaction finale) a été estimée a posteriori. Le gain environnemental lié à la réduction de la surface traitée a été quantifié. En outre, l’organisation du chantier, les délais, l’évaluation des stratégies et du risque pris à chaque opération ont été étudiés.
Calendrier des interventions et des observations
Pulvérisateur avec coupures de tronçons lors du traitement ciblé
L’intérêt de cette technique est réservé à certaines situations
Dans ces deux essais, toute la chaine logistique a pu être déployée, les adventices présentes sur l’interang ont bien été identifiées et la carte de détection s’est avérée cohérente par rapport aux observations sur le terrain.
Cependant, les parcelles des deux essais ont présenté un taux de couverture en adventices significatif mais une répartition plutôt homogène, ne laissant pas beaucoup de grandes zones exemptes d’adventices. En conséquence, la carte de préconisation était composée de peu de zones à ne pas pulvériser. Cela explique une diminution de la surface traitée plutôt limitée (18 % dans le premier essai par rapport à un traitement « classique » sur la totalité de la parcelle) et atténue l’intérêt économique et environnemental du service. Ainsi, pour que le ciblage du traitement soit pertinent et rentable, il faudrait caractériser un seuil d’infestation en adventices, ou plus précisément une répartition de l’infestation à partir de laquelle l’usage de cette technologie est justifié.
Ainsi, ces essais ont montré qu’une solution de traitement ciblé sur les zones infestées à partir de données acquises avec un drone est envisageable ; cependant, certaines conditions sont requises :
- une implantation du colza à grand écartement (60 cm) pour que la structure des rangs puisse être détectée par le drone
- au moment du vol du drone, le colza doit offrir une couverture du sol suffisante (stade suffisamment avancé) compte-tenu de la résolution d’acquisition du drone
- de même, les adventices doivent être suffisamment développées pour être détectées
- une infestation des adventices non uniforme ou hétérogène
D’autre part, ces essais ont mis en lumière plusieurs éléments restant à perfectionner :
- Limiter le temps entre la prise de vue par le drone et le traitement herbicide de façon à positionner le traitement au plus près du vol de drone, prendre en compte les levées d’adventices les plus tardives et profiter des conditions météo optimales pour la pulvérisation dès qu’elles se présentent.
- Paramétrer la traduction de la carte de détection en carte d’application pour s’assurer qu’elle soit pertinente, optimisée et compatible avec le fonctionnement du pulvérisateur au champ (format de console, positionnement des coupures de tronçons, érosion des adventices isolées, buffer autour des adventices concernées selon le délai de déclenchement et la précision GPS…).
- Caractériser les situations au champ pour lesquelles la modulation réalisée de cette façon présente un intérêt économique pour l’agriculteur car cette technologie n’est pas adaptée à toutes les parcelles.
Création de la carte de traitement
Pour générer la carte de traitement, il est nécessaire de prendre en compte :
- les différences de géolocalisation des GPS du drone et du tracteur
- la vitesse d’avancement du tracteur
- le temps d’ouverture des buses au moment du traitement
Des choix sont également à poser :
- supprimer les tâches d’adventices de petite taille
- délimiter les tronçons du pulvérisateur en fonction des passages de tracteur sur la parcelle
- le temps de latence entre l’envoi de la commande d’ouverture et l’ouverture réelle des buses des rampes du pulvérisateur est aussi à paramétrer dans la console et à apprécier selon le risque lié au type d’infestation pour la culture. Pour prendre le moins de risques, il faut sélectionner le coefficient le moins contraignant afin d’obtenir un démarrage précoce et une fermeture tardive de la rampe.
superposition carte de préconisation (tracé rouge)/ traitement (surfaces en bleu)
Malgré ces précautions, il peut exister des « faux négatifs », c’est-à-dire des zones non traitées alors qu’elles étaient infestées (déclenchement trop tardif de la rampe) ou des « faux positifs », soit des zones traitées alors que cela ne paraissait pas nécessaire selon la cartographie du drone (effet des recoupements entre buffers et la temporisation des ouvertures de tronçons).